Pour ceux et celles qui ont suivi les développements des politiques nationales de santé publique, au Québec particulièrement avec la mise à jour de cette année, et au Canada avec le premier rapport du responsable canadien, le discours de la Commission Marmot de l’OMS sur les déterminants sociaux de la santé ne sera pas une nouveauté.
Le soutien au développement sain de l’enfant; à des politiques publiques saines; à un urbanisme qui soit facteur de santé plutôt que de maladie; à des politiques sociales compréhensives et intégrées… ce sont des orientations très proches de celles promues depuis des années, avec plus d’insistance ces dernières années, par nos programmes de santé publique.
Mais le fait d’avoir en main cette synthèse magistrale, réalisée par le « père » du concept des déterminants sociaux, avec des données factuelles, des exemples de ce qui est fait et faisable, cela ne peut qu’aider les acteurs déjà engagés dans la promotion d’une intervention sur ces déterminants, une intervention qui passe par la réduction des inégalités socioéconomiques et la création de conditions favorables à la santé pour tous.
La réitération de ces objectifs n’est pas inutile… le pari n’étant pas vraiment gagné, même dans les pays professant une telle orientation depuis des années : deux rapports récents (voir plus bas) de l’INSPQ en font foi.
En lisant ces rapports une question me taraudait : peut-on vraiment « combler le fossé en une génération » ? N’est-ce pas du wishfull thinking ? Mais l’image qui m’est venue à l’esprit est celle de la campagne qui avait cours durant les années 60, où l’on promettait la richesse à ceux qui s’instruisaient… Il y avait sans doute plusieurs sceptiques à l’époque qui doutaient qu’on puisse vraiment démocratiser l’éducation… Cinquante ans plus tard, les inégalités ne sont pas disparues mais elles ont été grandement atténuées. Et savez-vous quoi ? Tout le monde en a profité, même ceux-celles qui avaient déjà accès à l’éducation ! Car l’accessibilité à l’éducation supérieure a permis à tout le Québec de connaître une période de développement rapide, à tous points de vue : économique, culturel, politique… Personne ne remettrait en question aujourd’hui le bien fondé de cette réforme démocratique. Il y a bien certains débats résiduels entourant le fait que les métiers et les formations courtes ont peut-être été négligés dans ce contexte… ou que le financement des études supérieures pourrait être assuré différemment… mais personne ne reviendrait en arrière.
On commence à mesurer avec plus de précision les effets positifs des programmes d’intervention sur les déterminants de la santé : à quel point l’accès aux services de garde et à des programmes de stimulation précoces (associés à un soutien alimentaire) on un impact mesurable et réduisent à long terme les besoins en soins et soutien… Les efforts de promotion dans les domaines de la vie active et de la saine nutrition sont encore trop jeunes pour que nous ayons une véritable mesure de notre ROI (return on investment). Mais les conditions sont maintenant propices à ce qu’une intervention suffisamment musclée et orchestrée soit menée afin qu’on parle pour la peine d’un investissement.
Mais les tensions sont encore, et seront toujours grandes entre les objectifs économiques (à court terme) et les objectifs sociaux et de santé à plus long terme… de là l’intérêt de profiter de la parution de ce rapport pour renforcer les initiatives et rassembler encore plus largement les acteurs désireux d’agir pour une plus grande équité en santé. En fait c’est le seul chemin possible pour une meilleure santé collective.
Ressources :
Les inégalités sociales de santé augmentent-elles au Québec? (2 juin) et Santé : pourquoi ne sommes-nous pas égaux? Comment les inégalités sociales de santé se créent et se perpétuent (29 juillet)
Enquête sur la maturité scolaire des enfants montréalais, DSP, 2008