Sommes-nous responsables ? Ou non ?
Pas tout à fait, pas les seuls… mais tout de même responsables de ce que nous ferons ou ne ferons pas.
Croissance zéro ou décroissance n’ont jamais été vraiment populaires. Dès le départ, en réponse au rapport du Club de Rome, Limits to growth (1972), les meilleurs esprits se sont ligués pour montrer qu’on ne pouvait arrêter de croître…
Il est rafraichissant de lire des blogues citoyens qui posent de bonnes questions…
Peut-être qu’il faudrait parler de décélération plutôt que de décroissance. Ralentissement de notre vitesse, de l’intensité de notre déprédation des ressources de cette planète. Car il aurait fallu trouver d’autres manières de croître, de se développer. Nous aurions pu, il y a quarante ans, changer de cap, réorienter nos processus… Nous ne l’avons pas fait.
De plus en plus on pense que les équilibres climatiques sont inéluctablement ébranlés et ont amorcé leur transformation chaotique. Les négationnistes pourront toujours prétendre que nous n’aurions pu, de toute façon, infléchir un processus qui s’était amorcé des centaines (milliers) d’années plus tôt.
Que faire si l’avenir qui s’annonce n’est pas la poursuite du développement et du progrès mais bien une lutte pour la survie dans des conditions de plus en plus difficiles ? Est-il encore temps de construire des résiliences ? Aurons-nous le temps de construire des sociétés de droits ?
Quand la mèche des gaz congelés s’allumera, il ne sera plus nécessaire de se priver pour éviter le réchauffement… car ça ne pèsera plus grand chose dans la balance ! Les « sociétés riches » (des villes, des régions, des îlots) prendront tous les moyens à leur disposition pour « se rafraichir », se protéger, se déplacer, se nourrir…
Les biens autrefois prisés par les classes moyennes (vins, viandes, automobiles) deviendront des biens rares, réservés aux nouvelles classes aristocratiques. Quand je lis des textes comme Requiem for a Species: Why We Resist the Truth About Climate Change, enfin, quand j’en lis le résumé offert par Dave Pollard, ça me déprime. Parce que j’ai tendance à croire que l’auteur de ce livre dit vrai : il est déjà trop tard, nous allons y passer dans le malaxeur de changements climatiques catastrophiques…
Peut-être est-ce inévitable, cette dépression. Pour changer de régime, de valeurs, de rythme. Pour perdre ses illusions, parce que nous ne pouvons plus être ce que nous avons tenté d’être… ce que nous avons été, partiellement, aveuglément, obstinément. (Relire Ehrenberg – La fatigue d’être soi) Pollard identifie des qualités à cultiver en ces temps de « transformations radicales » : autonomie, attachements communautaires, résilience, indépendance à l’endroit des pouvoirs centralisés…
Saurons-nous mobiliser nos pairs, l’humanité dans une action commune pour « sauver » ce qui peut l’être… pour transmettre aux générations futures plus que des cendres ? La Science est-elle du bon côté ? Les sciences sont par trop imbriquées, inextricablement entremêlées aux appareils techno-industriels pour être jugées en dehors des cultures et sociétés qui les ont nourries.
Les débats qui ont ponctué la prise de conscience des limites de la planète montrent à l’évidence les dimensions politiques des modèles scientifiques utilisés pour poser les questions pertinentes, fournir les outils méthodologiques et les concepts utiles à l’appréhension de la situation collective de l’humanité.
Les choix méthodologiques et scientifiques ne sont pas neutres.
Les sujets humains sont-ils responsables ? Ou s’ils ne sont que des animaux doués de langage et d’une exceptionnelle capacité d’abstraction et de planification qui auront fait de lui l’espèce dominante sur terre pendant quelques millénaires.