vents favorables

Gabriel Zucman, dans un document1A blueprint for a coordinated minimum effective taxation standard for ultra-high-net-worth individuals commandité par la présidence brésilienne du prochain G20218 et 19 novembre 2024, à Rio de Janeiro, appelle à l’établissement d’un impôt minimal de 2% par an sur les riches milliardaires. Comme il le dit : « Avec le leadership du Brésil au G20, la victoire du Parti travailliste au Royaume-Uni, la victoire de la gauche en France et la demande croissante partout pour mettre fin à la grande injustice fiscale de notre époque, le moment est venu ! » (ma traduction) Ici le résumé en français.

On imagine que les gouvernements de gauche nouvellement élus en France et au Royaume-Uni pourraient saisir l’occasion de prouver leur bonne foi. À moins que le désir de ne pas effaroucher ces puissances financières qui ont encensé les travaillistes… Ces derniers abandonnaient leurs engagements écologiques à mesure que leur victoire devenait assurée (Majority Without a Mandate, par Richard Seymour, 2024.07.05). Des gouvernements divisés, en proie à des luttes intestines, ou paralysés par la peur de faire « fuir les capitaux »… ce n’est pas tout à fait ce qu’il nous faut pour faire face à la musique. Mais c’est ce qu’on a. Alors comment faire pour sortir de cette situation plus forts qu’avant et plus aptes à faire « face à la musique » ?

D’abord reconnaître le poids de la droite dans certaines régions, certaines catégories sociales… La stratégie de réindustrialisation (relocalisation) prônée par Durand (Comment bifurquer) pourrait-elle répondre à certaines demandes de ces régions ? Un contrôle aux frontières, oui, mais pour mesurer les contenus et la provenance des produits importés et les effets des produits exportés sur les équilibres écologiques et politiques.

La présentation de ce livre :

Après des décennies de fantasmes néolibéraux sur les vertus régulatrices du marché, les gouvernants reparlent aujourd’hui de  » planification  » face à l’urgence climatique. Au-delà des affichages, en quoi consisterait une authentique planification écologique ?
Ce livre propose de revenir sur l’histoire de cette notion au XXe siècle, entre économies de guerre et expériences socialistes, de revisiter les débats classiques ayant opposé les adeptes du  » signal prix  » et ceux du  » calcul en nature « , mais aussi de montrer en quoi la situation actuelle est porteuse de possibilités de planification nouvelles. Le déploiement maîtrisé des outils numériques, des techniques comptables novatrices et l’approfondissement des institutions de la délibération collective peuvent donner lieu à un gouvernement de la production par les besoins. Tant qu’ils resteront pris dans le carcan du  » libre marché « , les écogestes des consommateurs se révéleront impuissants. Ce sont les structures économiques qu’il s’agit de transformer pour réduire l’impact écologique des activités humaines.
Face à ce défi, cet ouvrage tente de poser les piliers d’un programme de planification écologique fondé sur la décroissance dans l’exploitation de la nature, sur la justice environnementale et sur la démocratie économique.

Comment bifurquer, Les principes de la planification écologique, aussi accessible en mode libre pour « lecture à titre personnel ».

Le commentaire du journal Le Monde m’apprend que les auteurs sont plus proche de Mélenchon que je ne croyais. Ce qui n’enlève rien à la valeur de leur contribution…

Dans un ouvrage dense et argumenté, les deux chercheurs – par ailleurs membres actifs de l’Institut La Boétie, coprésidé par Jean-Luc Mélenchon – livrent une analyse touffue, parfois difficile d’accès, mais novatrice dans son approche. De fait, Comment bifurquer est l’une des premières tentatives de théoriser une planification qui – contrairement aux modèles de la France des années 1960 ou de l’Union soviétique – n’a pas pour objectif de produire plus, mais plutôt de produire moins, en fonction des besoins, dans le respect des limites planétaires. (GB souligne)

« Comment bifurquer » : un manuel pour planifier la transition sociale et écologique, Le Monde, 16 avril 2024

« [O]utils numériques, techniques comptables et nouvelles institutions de délibération » ne seront pas suffisants pour changer l’économie. Redonner à l’État les moyens de freiner certains secteurs et en accélérer d’autres. Deux pourcent sur les capitaux accumulés3et non seulement sur les revenus, plus aléatoires et faciles à cacher, c’est un départ. C’est se donner collectivement les moyens d’orienter, de contrôler l’économie.

Une partie de l’enjeu, sachant que les gouvernements, même de gauche, ne peuvent tout changer en un seul mandat, consiste à ressortir plus fort et mieux armés pour les prochaines étapes : des avancées sur les règles fiscales internationales; des indicateurs crédibles sur l’évolution de l’écologie; le traçage des matériaux et procédés contenus dans les objets échangés…


Gouverner à partir des besoins plutôt que se simplement suivre les désirs des plus riches… Il faudra pour cela identifier les besoins, delà les nouvelles institutions de délibération.

Un autre texte des plus intéressants qui remet en question la sacro-sainte compétitivité (L’impasse de la compétitivité):

[N]os meilleures chances de redressement se rencontrent dans une combinaison de sobriété matérielle et de relocalisation industrielle. (…) [I]l va falloir sécuriser nos approvisionnements et diversifier nos fournisseurs, mais aussi chercher à moins dépendre de nos importations, ce qui se traduit par la baisse de la consommation de ce que nous ne pouvons pas produire nous-mêmes (à commencer par les combustibles fossiles) et par la relocalisation d’activités industrielles.

Brice, Benjamin. L’impasse de la compétitivité (p. 156). Éditions Les Liens qui libèrent.

Notes

  • 1
    A blueprint for a coordinated minimum effective taxation standard for ultra-high-net-worth individuals
  • 2
    18 et 19 novembre 2024, à Rio de Janeiro
  • 3
    et non seulement sur les revenus, plus aléatoires et faciles à cacher

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