déficit démocratique et financiarisation

Voici un article paru sous le titre Democratic Deficits: Liberalism, Neoliberalism, and Financialization dans la revue American Affairs. Alex Bronzini-Vender y décrit un processus de financiarisation de l’économie (et de la politique) à partir du terrain des villes ou municipalités qui avaient à négocier des conventions collectives dans le contexte d’inflation des années ’70, puis celui de la transformation de la gestion des fonds de pension des années 80-90…

Cet article est, en fait une longue présentation critique (review essay) du livre de Brian Judge paru en 2024 : Democracy in Default: Finance and the Rise of Neoliberalism in America, titre qu’on pourrait traduire par La démocratie en faillite.

Qui est Brian Judge ? Un prof ou ancien prof de science politique à l’Université de Californie à Berkeley, qui est aussi « policy fellow » au Centre pour une IA compatible aux humains (Center for Human-Compatible Artificial Intelligence). Tiré de la présentation (quatrième couverture) :

Brian Judge soutient que la financiarisation a été une réponse presque spontanée à une crise au sein du libéralisme. Il examine comment le libéralisme tend à ignorer le problème des conflits distributifs, ce qui le rend vulnérable lorsque ces conflits éclatent. Lorsque le moteur de croissance de l’après-guerre a commencé à ralentir, la finance a promis de sortir de l’impasse politique qui en résultait, permettant aux démocraties libérales de dépolitiser les questions de distribution et de maintenir l’ordre social et économique existant. Les élus n’ont pas été simplement capturés ou cooptés, mais ont volontiers adopté des solutions financières à leurs problèmes politiques. Le déclenchement de l’impératif financier de générer des rendements monétaires a toutefois inauguré une transformation globale. Des études de cas très concrètes – la faillite de Stockton, en Californie, la stratégie d’investissement du California Public Employees’ Retirement System et la crise financière de 2008 – illustrent la manière dont les priorités des marchés financiers ont radicalement modifié la gouvernance démocratique libérale. Refondant les transformations politiques et économiques du dernier demi-siècle, Democracy in Default offre un nouveau compte-rendu audacieux de la relation entre le néolibéralisme et la financiarisation.

La présentation détaillée que Bronzini-Vender fait de ce livre m’est apparue suffisamment intéressante pour que je la traduise en français et que je prenne ensuite le temps d’y insérer les 88 notes en bas de pages ainsi que les liens hypertextes que ces notes recélaient parfois. Quelques-uns des articles auxquels ces notes réfèrent : Socialize Central Bank Planning, The Crises of Democratic Capitalism

Voici donc, en format PDF : Déficits démocratiques : Libéralisme, néolibéralisme et financiarisation.


P.S. Je vous propose ce texte de quelques 40 pages avec ses 88 notes en format PDF, généré par Word, à partir d’un document composé avec iA Writer puis exporté vers Word . Ce détour par Word me permettait de maintenir les notes en bas de page plutôt qu’en fin de document comme le PDF généré par iA Writer le faisait plutôt.

une autre façon de faire de la politique

J’ai commencé ce billet en commentaire du dernier congrès du parti Projet Montréal, qui se tenait au collège Maisonneuve les 2 et 3 novembre dernier. Je n’ai pas été assez rapide pour en terminer l’écriture avant que l’éléphant n’entre dans la pièce… 

Animateurs de talk-show, journalistes, analystes et sondeurs ont tous proposé leur interprétation de la victoire de T. ou de la défaite de son adversaire. Parmi les commentaires retenus, ceux de Monbiot, journaliste au Guardian, et de Wallace-Wells, du New-York Times. Pour votre convenance (et la mienne aussi !) j’ai traduit les deux articles: Les démocrates sont l’establishment, par WW et Trump s’est engagé à faire la guerre à la planète, par Monbiot. 

« Partout, l’argument centriste selon lequel la gauche doit abandonner ses principes pour combattre le fascisme, ne laissant le choix qu’entre les bureaucrates corporatistes et les nazis, a eu pour effet de renforcer le pouvoir des nazis. C’est une formule qui échoue à chaque fois. »

Cette citation de feu David Graeber résume assez bien le point de vue de Monbiot et d’autres critiques de la campagne menée par les Démocrates : on a réduit les attentes, caché les enjeux climatiques et environnementaux, pour rallier le centre, pour atteindre une majorité. Le texte de Monbiot est fort en ce qu’il inscrit la conjoncture actuelle dans le long terme : les gouvernements d’hommes forts, d’autocrates et de dictateurs ont été la norme plutôt que l’exception dans l’histoire humaine. 

La démocratie est une expérience récente, et qui a de toute façon toujours été partielle et impotente à soumettre vraiment les intérêts de la classe dominante à l’intérêt public. Sauf en de rares périodes, comme dans l’après-guerre, une période souvent dite celle des « Trente glorieuses ». Et même là… il est bon de se rappeler l’origine de cette expression, comme le fait Jules Calage dans le dernier hors-série de Socialter : Décroissance : Réinventer l’abondance

Ces « Trente glorieuses » années se terminaient sur des appels à la raison et à la prudence (Limites à la croissance, 1972) car elles se sont réalisées sans égard aux ravages infligés aux vivants et aux équilibres bio-physiques. Trente glorieuses qui ont coulé dans le béton et l’acier, un modèle de développement insoutenable. Plutôt que de suivre la voie de la prudence, les trente années suivantes ont été celle d’un hubris amplifié, accéléré par la libéralisation des échanges, la diminution importante de l’impôt sur la richesse, réduisant la capacité d’agir des gouvernements et libérant d’autant une capacité axée essentiellement sur l’accumulation de profit à court terme. L’hubris de la Grande accélération, pendant laquelle le gros du « budget carbone » qui nous restait fut consommé. 

Pour Wallace-Wells, « Le parti démocrate a occupé la Maison Blanche pendant 12 des 16 dernières années et se battait pour en occuper 16 sur 20. (…) [ L]es démocrates sont désormais le parti du pouvoir et de l’establishment, et la droite est le foyer naturel de toutes sortes de ressentiments anti-establishment – dont il est désormais clair qu’ils sont très nombreux. » 

Un programme en discussion

Pour en revenir au congrès de Projet Montréal, J’ai été membre de PM assez tôt dans son histoire. J’y contribue financièrement à chaque élection… mais c’était la première fois, autant que je me souvienne, que je participais aussi directement à la discussion sur le programme. Lors de la réunion locale, à l’arrondissement, où l’on a formulé des amendements à proposer au comité directeur (ou du programme…) j’ai défendu quelques propositions, par écrit, envoyées au maire, mais seulement une ou deux oralement lors de la rencontre… le temps était compté et chacun avait ses propres amendements à défendre. Une de mes propositions concernait la promotion d’obligations communautaires pour aider au financement de projets d’acquisition, de rénovation de logements afin d’accroître le stock « hors-marché ». Elle a été soumise à la discussion du congrès puis adoptée. 

J’avais formulé une autre proposition concernant la géothermie dans les ensembles domiciliaires.

Continuer la lecture de « une autre façon de faire de la politique »

information et démocratie

L’introduction du billet précédent (communication numérique) posait des questions auxquelles je n’ai pas vraiment répondu dans le développement de l’article :

Comment peut-on modérer les excès tout en favorisant la communication dans des réseaux appartenant aux usagers ? Si on veut rejoindre beaucoup de monde est-on condamné à mettre beaucoup d’efforts (et d’argent) à policer, exclure, contrôler, censurer ? Doit-on se satisfaire des limites actuelles des algorithmes des FB, X et autres Youtube qui décident à notre place ce que nous verrons, ou pas ?

La première question situe la modération dans le contexte particulier de réseaux appartenant aux usagers (ou sous le contrôle de ces derniers). La seconde question précise l’enjeu pour de grands groupes, de grands réseaux. Autrement dit peut-on imaginer une plateforme rejoignant beaucoup de monde qui ne soit pas infestée de spams, de discours haineux et de désinformation ET dont les règles soient entre les mains des utilisateurs plutôt que de propriétaires intéressés d’abord au profit ?

Certains prétendent que c’est impossible : qu’il y a une contradiction entre le grand nombre des usagers et la pertinence des fils de nouvelles proposés aux individus.

Comme le dit Mike Masnick dans son théorème d’impossibilité de Masnick, « la modération de contenu à grande échelle est impossible à bien faire ». Ironiquement, les mêmes effets de réseau qui augmentent la valeur des utilisateurs supplémentaires à mesure que les systèmes se développent augmentent également (au moins linéairement) la surface et le risque de modération du contenu, contrairement à la diminution des coûts par utilisateur grâce aux économies d’échelle. (…)

La médiation de contenu gérée de manière centralisée, comme la modération de contenu, est impossible à réaliser à grande échelle : il s’agit d’une tâche nuancée qui est hautement contextuelle, et nécessite donc une structure nuancée correspondante de traitement et de contrôle distribués pour être bien exécutée.

Community and Content Moderation in the Digital Public Hypersquare, Reisman et Riley

Reisman et Riley proposent de donner plus de pouvoir et d’outils aux aux individus et communautés/institutions dans le travail de « médiation curatoriale » permettant d’évaluer, de valider les informations qui circulent. Dans une série de quatre articles publiés de février à septembre 2022 ces auteurs développent leur analyse :

Et Reisman proposait en novembre 2023, dans Smartly Intertwingled: A New, Broader, More Fundamental Case for Social Media Agent « Middleware » (Intelligemment entrelacé… traduction Google), un argumentaire en faveur de « middlewares » qui viendraient faire ce travail de gestion, sélection, filtrage au nom, dans l’intérêt des usagers.

Reisman identifie trois piliers pour une gestion collective et intelligente des échanges :

  • L’agentivité et les choix individuels
  • Un écosystème de médiation sociale
  • La réputation et la confiance (des individus et organisations)

Ne pourrait-on imaginer En communPraxis jouant un tel rôle d’intermédiation ? Une façon de collectiviser le travail de découverte et de qualification des sources, d’accélération (ou décélération) des flux, de construction d’un espace de délibération libre du poids de la publicité.

Il faut se défaire de l’idée qu’il y a UN espace public, où devrait s’appliquer UN ensemble de règles pour tous les discours. Existent plutôt un semble d’espaces plus ou moins publics, dont l’accès et les contenus sont plus ou moins réservés ou policés. La démocratie qui serait gérée ou discutée à partir d’un espace commun unique, central… n’a sans doute jamais existé. Les places publiques ont toujours exclu des parties plus ou moins importantes de la population des délibérations : esclaves, femmes, étrangers… et aujourd’hui on pourrait ajouter les autres espèces avec qui nous partageons ce petit joyau de planète bleue.

En ajoutant les « autres espèces », n’est-ce pas ajouter encore au défi, déjà immense, de la délibération démocratique ? À moins que l’inclusion de ces « autres » ne corresponde à la prise en compte des limites écologiques, historiques, technologiques qui déterminent nos choix et nos actions. Et, incidemment, un des enjeux de l’inclusion de tels « partenaires non-verbaux » sera de décider des signes, des indicateurs qui nous informeront des intérêts/intentions de ces dits partenaires muets.

Il s’agit de plus que des discours et des savoirs dont nous devons aménager la libre circulation. La culture, le langage, les technologies sont utilisés pour dire, fabriquer les identités, réaliser les désirs ou simplement vivre. Les produits, les marchandises sont aussi des marqueurs forts des identités. Les métiers, les entreprises, les professions…

On ne peut développer une saine conception des espaces publics démocratiques sans situer cette discussion dans le contexte des avoirs, privilèges, pouvoirs qui structurent, façonnent les échanges et délibérations dans nos démocraties.

Si nous voulons parler des « vraies affaires » dans le contexte actuel de crises multiples, de perte de confiance dans les institutions traditionnelles (dont les médias) il faudra avoir des entrées (et des traductreurices) partout, afin de mobiliser (ou neutraliser) le pouvoir d’agir nécessaire. Ce que Durand Folco et Martineau nomment la coordination sociale algorithmique.

Jonathan Durand Folco et Jonathan Martineau, dans Le capital algorithmique, citent Morozov qui propose en matière de coordination sociale algorithmique non marchande et non autoritaire trois pistes : 1) la solidarité comme procédure de découverte; 2) le design de mécanismes non marchands; 3) la planification automatisée.

La solidarité comme procédure de découverte

 » Des plateformes favorisant la communication et la délibération représente l’un des exemples de cette coordination non marchande, [tel le réseau social En commun.] (…) Des «infrastructures numériques de rétroaction» pourraient favoriser ce genre de processus d’apprentissage individuels et collectifs, sans passer par la médiation des prix ou du marché. »

Durand Folco, Jonathan; Martineau, Jonathan. Le capital algorithmique (p. 596). Écosociété.

Le design de mécanismes non marchands

L’idée générale est que les mécanismes de coordination sociale ne doivent pas être conçus de façon rigide, par la simple opposition entre bureaucratie uniformisante et liberté marchande, car il y a une pluralité de moyens institutionnels permettant d’assurer la coordination sociale.

Durand Folco, Jonathan; Martineau, Jonathan. Le capital algorithmique (p. 597). Écosociété.

La planification algorithmique

Selon Morozov, ces innovations technologiques rendent caduque la nécessité de recourir à une planification centralisée de l’économie, et laissent plutôt présager une transition vers un «socialisme de guilde», comme le suggère aussi Daniel Saros. (…)

L’enjeu d’une planification algorithmique socialiste serait donc de favoriser une réappropriation démocratique de ces technologies algorithmiques, visant à les insérer dans un nouveau système économique qui ne serait plus axé sur la croissance infinie et la maximisation des profits, mais sur la satisfaction optimale des besoins humains avec un minimum de travail possible.

Durand Folco, Jonathan; Martineau, Jonathan. Le capital algorithmique (p. 598 et 599). Écosociété.

La planification algorithmique dans l’intérêt collectif, c’est le retour du débat d’il y a cent ans à propos de la théorie économique du socialisme. Mais avec des moyens qui n’existaient pas : pouvoir répondre en « temps réel » aux contraintes et signaux du terrain, du local. Dans un article de juin 2019, publié par la New Left Review, Digital Socialism, Morozov relate les débats des années 30-40 entre Hayek et les tenants de la planification socialiste et met ainsi en lumière les possibilités des technologies pour une planification démocratique et décentralisée, chose qui n’était pas possible à l’époque. 

Plus récemment le même Morozov a réalisé un important travail d’enquête et d’historien autour de l’expérience de planification menée par Stafford Beer et son équipe, avec les technologies « cybernétiques » primaires de l’époque, au service du gouvernement d’Allende au Chili. Il en a résulté une série d’entrevues (podcasts) mais aussi une somme impressionnante de documents afférents déposés sur le site dédié des Santiago Boys.

La finitude enfin reconnue des ressources de la planète et le poids accumulé des « externalités » générées par le développement accéléré des dernières décennies nous oblige à revenir à un État pour la planification écologique. Nous avons la chance que cette nouvelle planification puisse se faire de manière plus décentralisée, flexible. Nous n’avons plus les moyens, la planète ne peut plus supporter le développement aveugle du capital pour le capital.

populisme et démocratie

C’est un sujet déjà abordé ici et là dans ce carnet. J’y reviens aujourd’hui avec L’esprit démocratique du populisme, (EdP) par un sociologue italien (Frederico Tarragoni), publié en 2019 aux éditions La découverte. Le tour d’horizon historique et géographique de la question me semble plus complet que ce que j’avais lu jusqu’ici sur la question : notamment à propos des nombreuses expériences latino-américaines.

Parmi les racines historiques du populisme, il y a le « People’s Party » américain qui connut ses heures de gloire à la fin du XIXe en rassemblant les revendications des fermiers appauvris, des noirs du sud, des femmes… que Thomas Frank avait décrit dans Le populisme voilà l’ennemi ! et que j’ai commenté ici. Tarragoni reconnait l’importance de ce mouvement en Amérique, mais il fait remonter l’origine du populisme au mouvement narodnischestvo de Russie où des intellectuels qui se définissent comme des démocrates révolutionnaires « vont au peuple ».

« En Amérique latine, le populisme n’est pas resté, comme en Russie et aux États-Unis, une simple idéologie de crise. Il s’est institutionnalisé et à profondément changé les sociétés nationales et les manières de faire la politique. » (EdP, 215) Le populisme apparaît durant les années 1930 à 1960 dans tous les pays d’Amérique latine sur fond de crise des républiques oligarchico-libérales. La crise de 1929 accentue l’exclusion et la paupérisation amenant des mobilisations de masses dans les quartiers populaires des grandes villes (barrios, villas, barriadas ou favelas, selon les appellations nationales) qui seront captées par de nouveaux leaders charismatiques.

Une fois au pouvoir ces « partis-mouvements » populistes mettront en oeuvre des politiques axées sur le développement d’économies de substitution des importations et la reconnaissance de nouveaux droits sociaux.

« Parallèlement, la classe dirigeante de l’État se diversifie : la classe moyenne y occupe désormais un rôle prépondérant !

De leur côté, les classes populaires voient le stigmate public dont on les affublait du temps des républiques oligarchico-libérales, complètement inversé. Les populismes font d’elles le fondement même de la nation, à l’instar du « descamisado » (l’ouvrier « sans chemise ») de Juan’ Domingo Perón ou de la « querida chusma » (la « chère populace ») de José María Velasco Ibarra en Équateur et Jorge Eliécer Gaitán en Colombie.
Plus encore : c’est désormais du point de vue du « peuple pauvre », de ses valeurs, de ses besoins et de ses attentes, que l’on va repenser tout le processus de modernisation, voire la modernité même. » (EdP p. 225)

Tarragoni décrit l’émergence des populismes classiques d’Argentine (péronisme), du Brésil (gétulisme, pour Getúlio Vargas), du Mexique (cardénisme, pour Lazaro Cardenas) et puis des néo-populismes plus récents du Vénézuela (Chavez puis Maduro), de Bolivie (Morales) et d’Équateur (Correa).

Ce qui l’amène à formuler une nouvelle « théorie du populisme » où il distingue trois caractères communs des expériences analysées. D’abord le contexte marqué par l’incapacité de l’État à répondre aux multiples demandes démocratiques, un État lui-même en crise, miné par la corruption, l’augmentation des inégalités et la désagrégation des droits sociaux. La deuxième caractéristique commune est le rôle du charisme dans l’adhésion populaire à l’idéologie populiste. La troisième caractéristique est l’apparition de mouvements populaires interclasses. « Il n’est pas de populisme sans mobilisation des classes populaires précarisées, dans toute leur pluralité interne, mais également des fractions déclassées de classes moyennes. » (p. 266)

Trois moments de la dynamique populiste se suivent et se superposent : la crise, où la légitimité l’État est mise en cause, qui donne naissance à une forte mobilisation populaire interclassiste aspirant à créer un nouveau peuple démocratique, inspiré, dirigé par des leaders dans lesquels il se reconnaît. Puis, dans sa phase d’institutionnalisation, le populisme refonde constitutionnellement la démocratie, reconnaissant de nouveaux droits aux exclus d’hier.

« Cependant, en faisant participer la société civile populaire à l’élaboration de la politique sociale de l’État, le populisme lui offre une sorte de cadeau empoisonné. Il l’intègre de manière semi-corporative au fonctionnement de l’État et tend à réduire son autonomie par rapport à lui. Cette autonomie et vitale pour la société civile populaire, car celle-ci s’est constituée, dans la phase de mobilisation populiste, en luttant contre l’État. » (p. 294)

Une intégration de la société civile qui peut mener à des restrictions sur les libertés civiles chères aux sociétés bourgeoises libérales. Ce qui peut parfois conduire les états populistes à l’autoritarisme, ou même au fascisme.

Il suffit de penser à l’Argentine du deuxième péronisme, à l’Estado novo de Vargas, qui fut un régime expressément fasciste, ou aux évolutions liberticides des gouvernements de Chavez et Maduro, Morales et Correa. Tout en élargissant de manière démocratique certaines libertés positives1la possibilité, le droit de faire quelque chose des exclus, le populisme au pouvoir tend à réduire de manière autoritaire d’autres libertés négatives2absence d’entrave à la libre jouissance de soi-même, affaiblissant du même coup les médiations collectives entre la société et l’État. (p. 295)

Mais cette dérive autoritaire n’est pas obligatoire, dans la vision du populisme de Tarragoni. Au contraire, pourrions-nous dire, puisqu’il fait de la demande de plus de démocratie une caractéristique (radicalement démocratique) essentielle du populisme.

Après avoir décrit l’expérience latino-américaine, l’auteur se demande si l’Europe n’est pas à vivre une latino-américanisation à travers les mouvements Syriza grec, Podemos espagnol, cinq Étoiles italien et, dans une moindre mesure (hémiplégique) le Nuit debout et France insoumise.

Des trois premières expériences européennes, la seule qui n’a pas abandonné son programme ou trahi ses principes, est celle qui a refusé de participer au gouvernement. Certes il est plus facile de garder la pureté de son programme et de ses intentions quand on reste dans l’opposition.

Tarragoni termine son livre en rêvant d’une Europe refondée politiquement grâce à une alliance entre populismes de gauche et partis sociaux-démocrates. Une alliance au delà des frontières nationales, radicalement démocratique seule capable de faire opposition au néolibéralisme.


J’ai apprécié ce livre pour sa revue historique et sociologique des expériences latino-américaine et son tour d’horizon des mouvements populistes de l’Europe (occidentale) contemporaine; pour sa théorie de la nature profondément démocratique du populisme historique, réel.

Les politiques clientélistes d’un gouvernement comme celui de la CAQ ne sont pas populistes, elles ne sont qu’opportunistes. Quand on n’a à offrir comme idéal que celui de s’enrichir personnellement, à l’heure où les richesses accumulées et gaspillées étouffent et empoisonnent la planète… c’est une philosophie qui confine à l’obscénité.

Notes

  • 1
    la possibilité, le droit de faire quelque chose
  • 2
    absence d’entrave à la libre jouissance de soi-même

une convention citoyenne à la québécoise ?

Les programmes élaborés par les gouvernements provincial et fédéral ne sont pas assez ambitieux pour nous permettre d’atteindre les cibles nécessaires de réduction de gaz à effet de serre, même celles, déjà insuffisantes, du « consensus de Paris 2015 ». [On parle surtout du climat mais la protection de la biodiversité et des richesses halieutiques des hautes mers sont aussi des questions urgentes et complexes qui ne pourront se résoudre sans un impact lourd sur nos modes de vie.] 

S’il faut garder toujours un œil sur le compteur électoral en vue de la prochaine élection, il est compréhensible qu’aucun gouvernement n’ose formuler des politiques qui « font mal », en réduisant la liberté de certains choix, ou en incluant dans les choix d’aujourd’hui tous leurs coûts environnementaux… Aussi les politiciens ont de plus en plus recours à des assemblées citoyennes représentatives, des « processus délibératifs représentatifs » (representative deliberative processes).

« these deliberative bodies are well-suited to tackling long-term issues because citizens need not worry about the short-term incentives of electoral cycles, giving them more freedom than elected politicians. A minipublic can also embody a wide range of perspectives, an advantage for problems with complex trade-offs and value-based dilemmas. (…) minipublics are an excellent way to integrate public values with advice from scientists and ethicists. » 

Power to the people, Science, 30 octobre 2020. 

La Convention citoyenne sur le climat française ou encore le UK Climate Assembly au Royaume-Uni sont des exemples récents. De tels processus sont de plus en plus utilisés pour éclairer des enjeux complexes (planification urbaine, soins de santé, climat) par des gouvernements de niveau municipal, provincial ou fédéral. L’OCDE publiait récemment une synthèse tirée de l’examen de 289 processus menés dans le monde de 1986 à 2019 : Innovative Citizen Participation and New Democratic Institutions

Douze (12) modèles de délibération représentative. Tiré de  OECD (2020), Innovative Citizen Participation and New Democratic Institutions: Catching the Deliberative Wave.

Les 150 citoyens français ou les 110 du Royaume-Uni ont été choisis au hasard de manière à représenter, refléter la composition de la population du pays… et se sont vus confier des mandats de réflexion sur les enjeux climatiques à partir de présentations faites par des spécialistes, et des discussions en petits groupes. La manière dont ces groupes sont constitués et les processus délibératifs animés est déterminante. Ce qui a amené Fishkin, un pionnier de ces processus délibératifs, à déposer comme marque commerciale ses « deliberative polls (TM) » alors que les auteurs de la publication de l’OCDE développaient un guide des meilleures pratiques. “Fishkin trademarked the term “deliberative poll” partly to maintain quality control, and Chwalisz and her colleagues have published guidance on best practices.”

Mais qu’est-ce qui fait que ces processus délibératifs représentatifs feraient mieux que les formes plus traditionnelles de commission ou comités parlementaires ?  Ce sont des citoyens ordinaires, non des politiciens professionnels, ni des militants ou promoteurs d’une cause dans les enjeux examinés. Ces gens représentent ceux qui auront à vivre avec les conséquences des décisions à prendre. Les dernières décennies ont bien montré que l’exposition des faits et des données, les démonstrations scientifiques ne conduisent pas automatiquement à l’action appropriée.  Les processus délibératifs, lorsqu’ils sont bien menés, peuvent amener les gens à changer d’opinion, à identifier des points de convergence, des vecteurs consensuels. 

Encore faut-il que les consensus, les propositions issues de tels processus soient repris par les instances décisionnelles ou réglementaires afin d’être mis en pratique. Même lorsque l’initiative est issue du pouvoir central (comme la Convention française), le jeu des contre pouvoirs, des lobbys et des appareils administratifs peut contrecarrer l’application de telles résolutions. « La convention citoyenne butte, comme il était prévisible, sur l’appareil polico-administratif »

Ce qui fait dire à certains qu’il faudrait que de telles assemblées citoyennes soient décisionnelles (« Le climat, le citoyen et la convention : une fable à la française », Bonin et Baeckelandt, Nouveau projet #18). Mais ce serait trop simple de nommer (ou choisir au hasard) un groupe de personnes et s’imaginer que, par magie, les gens se plieront aux décisions prises par ce groupe. Surtout si ces décisions impliquent des changements comportementaux significatifs ou qu’elles touchent des groupes puissants.

Je crois que la seule manière de relever un défi comme le changement climatique est de mobiliser la population le plus largement et le plus profondément possible, en s’appuyant sur les réseaux déjà actifs dans la société civile. La création d’une assemblée, d’une convention citoyenne centrale serait nécessaire afin d’alimenter ce processus élargi, de fournir des propositions à débattre dans les régions et les quartiers. Le résultat de cet échange entre un centre et les réseaux, secteurs et régions du pays pourrait alors prétendre tracer un plan audacieux de changement qui soit à la hauteur des enjeux. 

La boîte noire, la magie qui opère (“Something magical happens”) dans les processus de délibération participative doit être expérimentée, vécue. Ce ne sont pas des choses qui peuvent être encapsulées dans une brochure ou une vidéo. Les gens doivent en faire l’expérience : être entendu, s’exprimer librement, entendre, écouter les autres, questionner et obtenir des réponses…  Autrement dit, ce sont cent assemblées citoyennes qu’il faut créer. 

Car ce dont il est vraiment question, finalement, c’est de reconstruire une économie.  Une étude finlandaise publiée il y a un an, Ecological reconstruction, évaluait qu’une société comme la Finlande devrait réduire sa consommation de ressources des deux-tiers pour atteindre un niveau soutenable pour la planète. (Finnish use of natural resources (both domestic and imported) will decrease to a globally sustainable level – roughly one third of the average per capita level in 2019.)

Les crises environnementales qui s’accumulent, en plus du changement climatique : perte rapide et importante de biodiversité; dégradation des océans; pertes de terres arables et d’autres ressources difficilement renouvelables… 

Il n’y a plus de temps à perdre, il faut se presser, mais lentement et ensemble. Comme disait Laure Waridel dans Une économie vert très pâle, « toutes nos décisions individuelles et collectives [devraient être] passées au crible de leurs impacts sur l’avenir de nos enfants. Cela nous fera immanquablement agir pour protéger l’environnement.« 

Voir aussi :


Aussi publié sur Nous.blogue

voir aussi En complément, écrit avec les citations et extraits non utilisés

populisme de gauche

9782226431899_mediumC’est (presque) le titre du dernier livre de Chantal Mouffe : Pour un populisme de gauche, publié en 2018 en version française chez Albin Michel. À voir monter en force les populismes de droite on peut en effet se demander si une version « de gauche » est possible. Les leaders populistes charismatiques ont souvent tôt fait de réduire l’importance des contre-pouvoirs, des institutions démocratiques. Yascha Mounk, avec Le peuple contre la démocratie, 2018, montre bien comment les mouvements sociaux et identitaires et les crises économiques ont contribué à fragiliser la démocratie. Les perspectives, les remèdes proposés par Mounk se limitent cependant à défendre la démocratie libérale : pour un nouvel État providence, une relance de la productivité et de l’économie, une « domestication du nationalisme »…

Mouffe va plus loin, même si elle le fait aussi dans le cadre de la démocratie libérale, en proposant une forme de radicalisme démocratique. « Radicalisme », pour se démarquer de la sociale-démocratie et « démocratique » pour se distinguer des révolutionnaires qui voudraient faire table rase des institutions et du cadre législatif des démocraties libérales. L’auteure reprend les thèses élaborées en 1985 avec Ernesto Laclau dans Hegemony and Socialist Strategy : Towards a Radical Democratic Politics, un livre paru en 2019 en traduction française chez Fayard/Pluriel : Hégémonie et stratégie socialiste

Le recours à Gramsci et au concept d’hégémonie ouvre sur la construction d’alliances (par l’établissement d’une « chaine d’équivalences ») entre les revendications ouvrières et populaires mais aussi sur la lutte au sein des appareils d’État pour leur transformation.

L’un des apports clés de Gramsci à la politique hégémonique est sa conception de l’« État intégral » comme incluant à la fois la société politique et la société civile. Il ne faut pas y voir une « étatisation » de la société civile mais la reconnaissance du caractère profondément politique de la société civile, présentée comme le terrain d’une lutte pour l’hégémonie. (Mouffe, Chantal. Pour un populisme de gauche)

Laclau et Mouffe ont inspiré les mouvements espagnol et grec (Podemos, Syriza). Mais je crois qu’il faudrait ajouter au radicalisme démocratique ce que Evgeny Morozov appelle le « radicalisme bureaucratique » dans son texte paru dans le dernier numéro de New Left Review : Digital Socialism ? The Calculation Debate in the Age of Big Data.

[T]he ambition is for radical democracy to join forces with ‘radical bureaucracy’ in order to take advantage of advanced infrastructures for planning, simulation and coordination.

Dans un article paru dans Le Monde diplomatique de décembre 2016, Pour un populisme numérique (de gauche), commenté avec brio sur le blogue de Maurel, Morozov défendait l’idée que les « données personnelles » qu’utilisent à leur profit les Amazon et Facebook de ce monde devraient être du domaine public, et à ce titre être accessibles, utilisables par tous. Avec Digital Socialism, il pousse un peu plus loin en promouvant la « socialisation des moyens de feedback ». La planification et la coordination sociales n’ont plus à être soit centralisées ou laissées au marché, elles peuvent être décentralisées grâce aux nouvelles technologies.

La référence à une « bureaucratie radicale » m’a ramené en mémoire La grande bifurcation, où les auteurs (Duménil et Lévy) développent l’idée d’un compromis à gauche qui saurait ébranler l’alliance des grands propriétaires et des gestionnaires grâce à une démocratie à trois niveaux : la démocratie interne aux classes de cadres, l’autonomie des classes populaires et la démocratie étendue.

9782897194949_mediumConstruire des « chaines d’équivalences », négocier des alliances entre forces populaires, c’est un peu ce qu’a fait Lorraine Guay toute sa vie, et ce dont elle parle avec Pascale Dufour dans Qui sommes-nous pour être découragées? Conversation militante avec Lorraine Guay.


Mes prochaines lectures : Agir sans attendre: notre plan pour un New Deal vert, par Alain Grandjean; The Uninhabitable Earth – Life After Warming, David Wallace-Wells; Gaspard de la nuit. Autobiographie de mon frère, Élisabeth de Fontenay; Peer to peer: The Commons Manifesto, Michelk Bauwens, Vasilis Kostakis et Alex Pazaitis.

nous définir contre « eux »

Chantal Mouffe critique la « démocratie délibérative » (en référence à Habermas) comme masquant la dimension conflictuelle du politique et la dénonce comme porteuse d’une illusion consensuelle (L’illusion du consensus) qui sert d’abord les intérêts néo-libéraux : comme si tous les intérêts pouvaient être servis par une approche pluraliste inclusive et les conflits résolus par la seule délibération rationnelle. Pourtant « les questions proprement politiques impliquent toujours des décisions qui exigent de faire un choix entre des alternatives qui sont indécidables d’un point de vue strictement rationnel » (Politique et agonisme,  Chantal Mouffe, 2010). Autrement dit il faut choisir son camp, et mener une lutte pour en imposer les règles.

Sa référence à Gramsci et son concept d’hégémonie me semble bien adaptée à l’obligation de changement de paradigme devant laquelle nos sociétés se trouvent. Nous devrons  changer profondément nos manières et valeurs, alors que les forces populaires semblent plus que jamais divisées en un patchwork de luttes, réseaux et communautés intentionnelles. Chantal Mouffe insiste sur l’importance du conflit comme élément constitutif du politique, créateur d’un « nous » qui se définit contre un « eux », sans lequel il n’y a pas de démocratie véritable.

Le rationalisme performant du néolibéralisme s’accommode bien d’une approche inclusive de tous les acteurs sous le grand chapiteau d’un démocratisme libéral ou délibératif. Pourtant, il n’y aura pas de décision, d’action significative, suffisamment puissante pour changer le cours de choses sans l’identification d’adversaires, sans l’opposition entre des systèmes de valeurs,  formant programmes ou plus, des projets hégémoniques et contre-hégémoniques.

Cette nouvelle culture hégémonique, la seule apte à transformer en profondeur les habitus et manières, institutions et marchés qui ont façonné jusqu’ici nos sociétés, sera le produit de moments instituants, de négociations historiques entre différentes portions, différents mouvements sociaux porteurs de valeurs particulières ou sectorielles ou régionales. Des valeurs jugées équivalentes ou complémentaires et valant pour cela d’être inclues au programme collectif.

Mais on ne passe pas d’une culture de la diversité et de l’éclatement, du repli identitaire, localiste ou  xénophobe  à un cosmopolitisme solidaire en prenant une décision à majorité, qu’elle soit simple ou absolue. Ce sont des processus qui permettront d’établir la confiance entre partenaires et parties. Une confiance qui devra aussi s’étendre aux adversaires s’ils acceptent, au delà des oppositions et conflits, de préserver les règles et un espace démocratique communs.  Des processus portés, pratiqués par des collectivités, des organisations. Des fils réunis en faisceau qui seront tissés en toiles humaines ou tissus urbains pour former la culture d’une nouvelle société plus juste parce que plus durable et plus durable parce que plus juste.

Liberty Leading the People. 1830. Oil on canvas, 260 x 325 cm.

Mouffe semble certaine qu’on peut aller très loin dans le cadre de la démocratie libérale, pourvu qu’on respecte, de part et d’autre, certaines règles de base. Mais justement, qu’arrive-t-il lorsque l’une des partie ne respecte pas ces principes fondamentaux? Comment résister à la tentation de la réplique? Parce qu’on aura pris le « chemin haut »,  celui des principes ? Mais celui qui n’a pas de principe ou plutôt peu de respect pour les autres, la démocratie… sous prétexte que « les autres » sont moins travaillant, moins performant que soi…  Celui-là possède souvent plus de moyens, plus de richesse pour imposer le respect de ses propres intérêts, pour tirer avec profit son épingle du jeu. Ceux qui pratiquent l’évasion doivent être punis, car ils profitent d’un système sans en soutenir les coûts. En général les gens sont assez favorables à de telles règles.

Nous devrons faire plus que changer de gouvernement, nous devrons changer de mode de vie. Il y a urgence en la demeure. Il faut « sauver la maison commune » disait le pape François dans son encyclique Laudato Si. Les mots nous manquent pour dire cette urgence après l’ajout répété de nouveaux superlatifs à chaque rapport produit par les scientifiques du climat, entre autres. Il s’agit d’un changement radical et non pas incrémental.

[L]a révolution politique s’accomplit en fournissant à des groupes sociaux dont les intérêts de classe diffèrent, voire divergent, des référents et une grammaire émancipateurs communs. (…) C’est la notion de « chaîne équivalentielle » qui constitue le pilier de cette théorie générale du politique : celle-ci permet de traduire un ensemble de demandes particulières éparses en une revendication politique universalisable aspirant au statut d’hégémonie » (Tirés de Vers une logique générale du politique: identités, subjectivations et émancipations chez Laclau, par Frederico Tarragoni.

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Nous devons définir ce « nous » en décrétant une limite, une frontière entre nous et « eux », c’est ce que Laclau et Mouffe défendent, proposent comme la seule manière de définir un acteur collectif, un peuple. Mais comment ne pas tomber dans la vulgate populiste, qui séduit le peuple en feignant s’opposer aux élites ? Comme si ces milliardaires autour de Trump pouvaient faire parti du peuple ! Finalement c’est la lutte contre les « bureaucrates de Washington » qui réunit cette clique. Par bureaucratie ils entendent l’intervention publique, la responsabilité collective, dénoncée afin de laisser encore plus de place à la liberté pure du capital et l’irresponsabilité individuelle.

mode de scrutin

Évidemment, ce n’est pas le parti libéral qui sera porté vers le changement des règles, avec la majorité que ces dernières lui ont permise. Mais la pétition lancée par le Mouvement démocratie nouvelle approche des 75 000 signatures… J’ai rarement vu des signatures s’accumuler à ce rythme ! Plus de 200 signatures se sont ajoutées dans la dernière demi-heure.

Allez-y de la vôtre… sur Avaaz.org

Si l’élection avait été proportionnelle, une analyse de Radio-Canada. Voir aussi article aujourd’hui dans Le Devoir.

Avec une représentation proportionnelle, les partis seraient moins caricaturaux dans leur discours et plus respectueux de la complexité et la diversité du monde. On peut espérer, on peut compter qu’une plus grande proportionnalité du vote amènerait une plus grande diversité de voix entendues à l’assemblée nationale. Des voix qui parlent au nom de groupes qui autrement deviennent indifférents, désengagés ou, pire, réfractaires aux processus démocratiques.

Avec une représentation proportionnelle la discussion entre les partis ne s’arrêterait pas avec l’élection mais se poursuivrait dans la constitution de programmes de gouvernement, dans la négociation d’ententes reflétant plus fidèlement les attentes et espoirs de la population.

ce qu’il reste de la culture commune

(…) the growing inequality of our society makes it almost impossible to imagine ever formulating a shared sense of the good life.  The very idea of the common good becomes a stretch given the profoundly different ways in which the super rich, the poor and the majority experience life.  They breathe different air and especially as social mobility dries up they lose touch with each other.  In an increasingly privatised world, they do not meet as fellow citizens.  Their kids go to different schools.  They live increasingly in different neighbourhoods.  In Canada the last place that is meant to accommodate all of us in shared experience is our public health system – and no wonder the pressure to privatize is relentless. (…) just as the very rich want to see taxes cut to hold on to what they have, so too do the majority want to withhold their money from a state they no longer trust.[via Alex Himelfarb’s Blog]

Une autre page intéressante de ce blogue sur l’état de la société démocratique canadienne.