des CRD aux CRÉ aux préfets

Je me suis demandé quand et comment les CRÉ avaient été créées ? En tant que montréalais plus au fait des Tables de concertation de quartier je n’ai vu que de loin ces instances se mettre en place. Pour ce qui est du rôle des préfets… j’ai toujours pensé que c’était des surveillants en soutane 😉

Quelques articles jettent un éclairage sur l’origine des CRÉ (conférence régionale des élus) qui venaient remplacer en 2003-2004 les CRD (conseil régional de développement) mis en place au début des années 90. Une page du site ORÉGAND, Les CRÉ : historique sommaire; une autre de l’Observatoire en économie sociale… Les Conférences régionales des élus ou la démocratie revisitée.

En passant des CRÉ aux préfets des MRC, la logique à l’oeuvre est la même que celle qui a décrété l’abolition des agences de la santé : centraliser le pouvoir à Québec. Il sera plus difficile aux préfets, même s’ils sont élus par leurs pairs (les maires de la MRC) ou la population du territoire, de s’opposer aux dictats de Québec que les CRÉ pouvaient le faire.

Bien sûr, les CRÉ n’étaient pas sans leurs défauts. Comme dit l’adage « là où il y a de l’homme… » Mais le pays a besoin de ses régions, et de ses pôles urbains régionaux. Faire disparaître les régions en isolant les MRC c’est affaiblir la nation. Et affaiblir la nation, c’est réduire sa capacité de contribuer au concert des nations rassemblées ou coopérantes.

Il y a vraiment une approche jacobine à l’oeuvre, où tout ce qui s’interpose entre le citoyen et l’État devient impertinent et nuisible. Pourtant cet affaiblissement des « corps intermédiaires » n’est pas un prélude au renforcement du pouvoir public mais bien, au contraire, à son affaiblissement : c’est une facette de la religion du « moins d’État » qui anime ce gouvernement. Une quatrième révolution est entrevue comme la solution…

Revoir le rôle de l’État, pour faire quoi ? Pour avoir les coudées franches lorsque la prochaine crise financière viendra exiger des milliards pour sauver les banques ?

le local n’est plus ce qu’il était

Avec des territoires locaux comme ceux-là pour Montréal, le « développement local » s’éloi-gne des organisations et réseaux qui font le développement social, l’éducation, les soins et services de première ligne… alors que le vrai développement exige qu’on tienne compte au plus haut point de l’impact social des dépenses et investissements. Il faudra non seulement maintenir et rehausser la qualité et la pertinence des efforts publics mais encore articuler une meilleure interface avec les secteurs communautaires et privés.

Extrait de la  Loi concernant principalement la mise en oeuvre de certaines dispositions du discours sur le budget du 4 juin 2014 et visant le retour à l’équilibre budgétaire en 2015-2016. (PDF)

« DÉVELOPPEMENT LOCAL ET RÉGIONAL

« 118.82.3. Aux fins de l’application de l’article 126.2 de la Loi sur les compétences municipales (chapitre C-47.1), la municipalité centrale doit maintenir un point de service à l’égard de chacun des territoires suivants :

1°  le territoire composé de celui des villes de Montréal-Est et d’Anjou et de celui des arrondissements de Rivière-des-Prairies–Pointe-aux-Trembles, de  Montréal-Nord, de Saint-Léonard et de Villeray–Saint-Michel–Parc-Extension;

2°  le  territoire  composé  de  celui  des  arrondissements  de  Rosemont–La  Petite-Patrie et d’Ahuntsic-Cartierville;

3°  le  territoire composé de celui des arrondissements de Ville-Marie, du  Plateau-Mont-Royal et de Mercier–Hochelaga-Maisonneuve;

4°  le territoire composé de celui des arrondissements de Verdun, du Sud- Ouest et de LaSalle;

5°  le  territoire composé de celui des villes de Côte-Saint-Luc, de Mont- Royal, de Westmount et de celui des arrondissements de Côte-des-Neiges– Notre-Dame-de-Grâce, de Saint-Laurent et d’Outremont;

6°  le territoire composé de celui des villes de Beaconsfield, de Baie-D’Urfé,  de Kirkland, de Pointe-Claire, de Dollard-des-Ormeaux, de Dorval et de Sainte- Anne-de-Bellevue,  de  celui  du  Village  de  Senneville  et  de  celui  des  arrondissements de L’Île-Bizard–Sainte-Geneviève, de Pierrefonds-Roxboro et de Lachine. ».

Alors que dans les régions, les territoires se décomposent et éclatent en plus petites MRC, à Montréal l’action locale est amalgamée en de nouvelles sous-régions. Différentes encore de celles crées ces dernières décennies : arrondissements, CSSS (et maintenant CISSS). C’est vrai que les synergies deviennent moins importantes quand ce qu’on prévoit faire comme intervention se veut avant tout mesurable et comparable plutôt qu’adapté et pertinent.

crise du développement

Intéressant dossier publié aujourd’hui par Le Devoir, sur l’austérité et ses conséquences concrètes sur les personnes vulnérables, la solidarité et la vitalité des régions. Promesses brisées, gestes et décisions précipitées au nom d’une idée fixe, une idéologie de l’équilibre budgétaire comme voie obligée de relance de l’économie. Pourtant on voit bien les effets de ces remèdes de cheval en Europe. Et pourquoi, pour quelles fins ? Si les économistes ont raison l’austérité est là pour rester… et en ce sens il importe peu que l’actuel gouvernement ne semble pas avoir de projet au delà du retour à l’équilibre 🙁

Le premier ministre a beau prétendre que « l’austérité est une vue de l’esprit », ceux qui perdront leur emploi dans les CLD et les CRÉ de même que les jeunes entrepreneurs qui voient leurs projets mis sur la glace… ont une autre perception de la chose.

Incidemment, j’ai voulu aller voir qui était ceux et celles qui travaillaient dans les CRÉ (je n’ai pu faire la même chose pour les CLD…). Ici les données que j’ai pu glaner rapidement sur internet pour 8 CRÉ.

Conférence
régionale des élus
Total Femmes
Vallée-du-Haut-St-Laurent 24 16
Abitibi-Témiscamingue 22 15
Saguenay-Lac-St-Jean 12 6
Montérégie-Est 16 14
Laval 22 18
Gaspésie-Îles de la Madeleine 34 21
Estrie 17 14
Total : 147 104

Plus de 70% des emplois dans les 8 CRÉ répertoriés ici sont occupés par des femmes, jeunes pour la plupart.

* * *

Je reproduis ici une partie de l’appel à contributions de la revue K pour son prochain numéro :

« Dans cette période d’austérité, plusieurs organismes voués au développement collectif voient leurs ressources financières diminuer et doivent faire preuve de créativité pour survivre et se réinventer. (…)

  • Quelles menaces et opportunités ouvrent ces transformations?
  • Quelles expériences risquent de disparaître? Quelles expériences peuvent se renforcer?
  • Quelles innovations sociales et alternatives surgiront de cette solidarité accrue qui est le propre des périodes de crise?
  • Quelles formes prendront les solutions qui visent à améliorer la société dans laquelle nous vivons? »

La revue sollicite vos idées de textes, de pistes de recherches ou de personnes intéressantes à contacter. 

Faut répondre avant le 23 décembre en faisant part de vos expériences, vos activités, idées à propos de l’avenir du développement collectif au Québec.