gazouillis et citations

Alors qu’on ne cesse de répéter que nous manquons de moyens de faire des tests… ce qui nous oblige à naviguer à l’aveugle quand il s’agit de planifier le processus de déconfinement… Jusqu’où le contrôle et la propriété des pharmaceutiques est-il responsable de cette pénurie ?

Les dettes qui s’accumulent par milliards chaque jour qui passe annoncent-elles des années et décennies d’austérité ? Mesures d’austérité passées qui sont en partie la cause des problèmes actuels ?


Une belle synthèse de la situation actuelle, économique-écologique. par cet économiste, philosophe et… jésuite !


L’industrie de l’automobile fait face à une crise immédiate et un déclin annoncé. Comment réagira-t-elle? — un article du The economist

On April 17th Ford raised $8bn of debt at painful interest rates of 8.5-9.6%.
Adaptation would be far preferable to extinction. And yet there is a risk that government aid ossifies car firms before they have modernised.
Subsidies for idling workers help in the short run, but if they go on for long they risk preventing firms from shifting resources from old to new technologies.
Most car firms have two parts, a vast legacy operation and a small, loss-making, fast-growing one making hybrid and fully electric cars. The danger is that they cut spending on the new bit, slowing the development of battery technologies and the launch of new electric models. Better to pare dividends, loss-making foreign adventures and legacy investments.
Pimp the ride – The car industry faces a short-term crisis and long-term decline | Leaders | The Economist

point tournant ou accélération ?

Est-ce que « nos années ‘20 » conduiront à des années ’30 comme celles du siècle précédent ? On dit que les crises sont des moments propices aux transformations profondes. Mais ce ne sont pas toujours des transformations progressistes : si le New Deal américain inspire encore aujourd’hui les promoteurs d’un nouveau pacte économique et environnemental, il ne faut pas oublier que la même période a aussi porté au pouvoir les Hitler, Franco, Mussolini, Salazar et Staline ! 

En décidant, à la fin de l’an dernier, de placer le 5e anniversaire de Nous.blogue sous une enseigne prospective plutôt que rétrospective, nous n’avions pas prévu que le contexte serait aussi favorable à une révision en profondeur des perspectives ! 

Si certains ont vite fait de voir dans cette pandémie un point tournant de l’Histoire (Why this crisis is a turning point in history.) d’autres n’y verront qu’une accélération de tendances déjà à l’œuvre depuis des années : montée des nativismes et des xénophobies, érosion du leadership international des États-Unis, difficultés accrues du projet Européen (The Pandemic Will Accelerate History Rather Than Reshape It). 

Il est bien possible que les politiques qui naitront de la période actuelle se révèlent contradictoires. Quelle surprise ? Du genre sauver l’environnement en investissant dans l’industrie du pétrole, ou un « troisième lien »… Mais l’inconséquence et les pas de deux (un en avant, deux en arrière) de nos gouvernements ne doivent pas nous empêcher de réfléchir : n’avons-nous pas du temps, plus que jamais ? L’actuelle période de vie au ralenti n’est-elle pas propice à un retour sur nos habitudes, nos besoins, nos espoirs ?

La belle unité d’action qui s’est manifestée pendant la première période de la crise, avec un consensus fort autour des mesures de distanciation sociale et des soutien financiers nécessaires, risque d’éclater bien rapidement quand il s’agira de relancer l’économie ou de tirer des leçons pour l’avenir. À combien de périodes de compressions et de « rationalisation » des dépenses publiques nous exposons nous pour l’avenir, afin de payer les dettes qui s’accumulent actuellement, si nous ne changeons pas la logique qui a d’ailleurs contribué à exacerber la crise : réduction des dépenses (et investissements) en santé publique, en soutien aux personnes de santé fragile, en services de base dont on reconnait aujourd’hui le caractère essentiel (préposés, entretien, transport), au nom d’un équilibre budgétaire toujours inatteignable parce qu’on souhaitait, en même temps, réduire les impôts perçus comme exagérés ou, carrément, inutiles et nuisibles. 

Accumulating wealth and maintaining capitalism’s health at the expense of other goals have dominated public discourse for nearly four decades. Maybe we’re sick and tired enough now to think about something else. (The economy VS human life)

[L’accumulation de richesse et le maintien de la santé du capitalisme au détriment des autres finalités ont dominé le discours public depuis quatre décennies. Peut-être sommes-nous assez fatigués et malades pour penser à quelque chose d’autre.]

Il y a tout de même des signes encourageants quand même les éditorialistes du Financial Times reconnaissent que « des réformes radicales, renversant les tendances des quarante dernières années, sont devenues nécessaires. Les gouvernements doivent devenir plus interventionnistes dans l’économie; les services publics sont des investissements et non des dépenses; la redistribution et la taxation des richesses, la question d’un revenu de base doivent être mises à l’ordre du jour. » [Radical reforms — reversing the policy direction of the last four decades — will need to be put on the table. (…) Policies until recently considered eccentric, such as basic income and wealth taxes, will have to be in the mix. – Virus lays bare the frailty of the social contract, Financial Times, 3 avril 2020]

NOTE: Si vous ne pouvez accéder à l’article du FT en cliquant le lien… recopiez le début de la phrase (en anglais) « Radical reforms »… jusqu’à « four decades » et cherchez le dans Google. Vous y aurez peut-être accès !

Des initiatives individuelles comme ce blogueur, Clément Laberge, qui propose à la discussion des idées pour l’après. Mais j’aime bien l’initiative lancée par Bruno Latour d’un questionnaire simple (6 questions) qui se veut un « Exercice pour préparer l’après crise sanitaire pour être sûr que tout ne revienne pas comme avant ». Je reproduis ici les 6 questions mais vous pouvez aussi utiliser un formulaire en ligne (Où atterrir après la pandémie?). 

Il s’agit de faire la liste des activités dont vous vous sentez privées par la crise actuelle et qui vous donne la sensation d’une atteinte à vos conditions essentielles de subsistance. Pour chaque activité, pouvez-vous indiquer si vous aimeriez que celles-ci reprennent à l’identique (comme avant), mieux, ou qu’elles ne reprennent pas du tout. Répondez aux questions suivantes :
Question 1 : Quelles sont les activités maintenant suspendues dont vous souhaiteriez qu’elles ne reprennent pas ?
Question 2 : Décrivez a) pourquoi cette activité vous apparaît nuisible/ superflue/ dangereuse/ incohérente ; b) en quoi sa disparition/ mise en veilleuse/ substitution rendrait d’autres activités que vous favorisez plus facile/ plus cohérente ? (Faire un paragraphe distinct pour chacune des réponses listées à la question 1.)
Question 3 : Quelles mesures préconisez-vous pour que les ouvriers/ employés/ agents/ entrepreneurs qui ne pourront plus continuer dans les activités que vous supprimez se voient faciliter la transition vers d’autres activités ?
Question 4 : Quelles sont les activités maintenant suspendues dont vous souhaiteriez qu’elles se développent/ reprennent ou celles qui devraient être inventées en remplacement ?
Question 5 : Décrivez a) pourquoi cette activité vous apparaît positive ; b) comment elle rend plus faciles/ harmonieuses/ cohérentes d’autres activités que vous favorisez ; et c) permettent de lutter contre celles que vous jugez défavorables ? (Faire un paragraphe distinct pour chacune des réponses listées à la question 4.)
Question 6 : Quelles mesures préconisez-vous pour aider les ouvriers/ employés/ agents/ entrepreneurs à acquérir les capacités/ moyens/ revenus/ instruments permettant la reprise/ le développement/ la création de cette activité ? 

[ Je n’ai pas encore pris le temps de remplir moi-même ce questionnaire, mais je serais très intéressé à échanger avec ceux et celles qui le feront aussi.]

Mais le « plan de transition » ne s’élaborera pas en additionnant simplement les opinions et besoins individuels. Évidemment. Nous devons avoir d’autres indicateurs que financiers pour orienter le développement économique. Une « bio-économie » à la Georgescu-Roegen ?[1] De même que nous devons trouver des moyens pour maintenir l’innovation technologique et sociale[2] dans un contexte où la « croissance brute », associée habituellement à l’augmentation des matières et énergies consommées, est grandement limitée, puis réduite. Un contexte où l’appât du gain n’est plus le seul ou le principal aiguillon orientant le développement, mais où la prise de risque (et l’innovation) est encore possible, même favorisée. 


[1] Voir Pierre Charbonnier, Abondance et liberté, p. 325-332

[2] L’idée de dotation universelle en capital, avancée par Thomas Piketty dans Capital et idéologie p. 1126 et ss, peut être interprétée en ce sens. 

Article publié aujourd’hui sur Nous.blogue

2600 articles indexés

J’étais déjà abonné depuis quelques mois à la liste hebdomadaire d’articles publiée par Evgeny Morozov et son équipe, The Syllabus. Des articles rassemblés par thèmes : The Activist (on social justice), The Machinist (on technology), The Cosmopolitan (on global affairs), The Intellectual (on arts & culture), The Progressive (on political economy).

Depuis l’éclosion de Covid-19, cette même équipe s’est mise à publier une recension quotidienne d’articles sur la pandémie, Coronavirus Readings, comportant un nombre croissant d’éléments : une centaine au début (16 mars) elle en comportait 302 le 2 avril. Pour un total cumulatif (au 2 avril) de 2592 articles de journaux, de revues, podcasts, etc.

Cette somme impressionnante d’information est accessible par le biais d’un courriel quotidien auquel on peut s’abonner gratuitement mais aussi par à une interface de consultation des archives cumulées : The politics of Covid-19.

Interface de consultation des archives de la publication quotidienne Coronavirus Readings

On peut ainsi rechercher l’ensemble des articles cumulés par mot-clé dans le contenu des articles, par date, par source, par langue (8) ou par type de document (journaux, revues, podcast, vidéos…).

Pour vérifier si la recherche se faisait sur les titres ou sur le contenu des articles j’ai tenté une recherche avec « Gramsci » et j’ai trouvé un (1) article qui citait cet auteur : Morbid Symptoms: COVID-19 And Pathologies In The Body Politic.

Enthousiaste devant une telle mine d’information, j’ai tenté de passer en revue, même rapidement, les articles proposés par ces listes quotidiennes pour en extraire un « best of » très subjectif, comme je l’ai fait dans mon dernier billet. Mais j’ai vite été dépassé. Il me faudrait plus d’une journée pour lire ne serait-ce qu’une fraction des 302 titres proposés hier, sans compter les heures nécessaires à sélectionner cette fraction ! Il est vrai que je me concentre sur les articles en français et en anglais. Ce qui fait tout de même 199 titres. Par ailleurs beaucoup des sources françaises sont réservées aux abonnés : Le Monde, Libération, Alternatives économiques… C’est d’ailleurs une suggestion que je ferais à l’équipe de Syllabus pour améliorer leur recension : identifier les articles qui sont réservés aux abonnés.

Je vais tout de même poursuivre ma revue de ces masses d’infos, tout en sachant qu’elle sera de plus en plus partielle !

l’entraide au temps… (3)

Une adresse des plus utiles actuellement : la Prestation canadienne d’urgence


Des 350 références colligées ces trois derniers jours par l’équipe de The Syllabus qui publie depuis 10 jours son Coronavirus Readings, j’ai retenu celles qui suivent. Rassemblées en 4 groupes : philosophie, politique, économie et transition.


Philosophie

Urgence ou crise ?

Une urgence (emergency) est une situation imprévue, qui amène des mesures temporaires visant à ramener la situation au « statuquo ante », à la normale le plus tôt possible. Une crise peut être prévisible, et même annoncée. Elle se résout habituellement par des changements de rôles ou de structure qui feront que la situation ne sera plus pareil après qu’avant.

The appropriate response to a crisis is not temporary emergency powers but permanent, future-oriented transformation.

Yes, COVID-19 Is an Emergency : It’s Also a Paradigm Shift – Public Seminar

Questions pour temps d’épidémie

Peut-être comprendrons-nous que cette épidémie meurtrière nous offre l’occasion d’extirper de nous-mêmes des couches de graisse, d’avidité bestiale. De réflexion obtuse et aveugle. D’une abondance devenue un gâchis qui a commencé à nous étouffer (et pourquoi diable avons-nous accumulé tant d’objets ? Pourquoi avons-nous à ce point bourré et enterré nos existences sous des montagnes d’objets superflus ?).

Questions pour temps d’épidémie – Libération

L’épistocratie

La rationalité scientifique ne peut pas résoudre les dilemmes moraux !

Les sachants, l’exécutif et le Covid-19 : un triptyque révélateur de l’épistocratie ? | Le Club de Mediapart


The Plague That Killed Athenian Democracy

Want to know how disease can permanently alter a society? Read Thucydides.

Thucydides and the great plague of Athens have a lot to teach us in the age of the coronavirus.

Politique

Cette crise rend visibles ceux qui sont d’ordinaire invisibles

Notre société est quasiment à l’arrêt, cantonnée à ses fonctions essentielles – protéger, soigner, nourrir. Il y a des métiers entiers qui sont dehors pendant que la plupart d’entre nous sommes dedans : caissières, livreurs, soignants, éboueurs, gendarmes et policiers, boulangers… une armée de l’ombre s’occupe de leurs enfants après l’école ou nettoie leurs appartements.

On a beaucoup parlé de «société de la connaissance», il faut aujourd’hui inventer une nouvelle économie des rapports sociaux. Mais il faut défendre une idée extensive du «care» qui ne se limiterait pas au soin porté aux malades, aux personnes âgées et aux enfants. Nous devons l’étendre à toutes ces fonctions qui permettent à la société de tenir debout. La caissière du Monoprix parisien qui habite en banlieue et qui termine à minuit fait partie de ce «care».

«Cette crise rend visibles ceux qui sont d’ordinaire invisibles» – Libération

Grocery Stores Are the Coronavirus Tipping Point

Before he went into quarantine, the Atlanta Whole Foods worker I interviewed overheard a customer walk into the store and say into his phone, “I’m pretty sure I have it; I’m going to the doctor now. I just have to stop at Whole Foods first.”

Can You Get Coronavirus from the Grocery Store? – The Atlantic

Continuer la lecture de « l’entraide au temps… (3) »

L’entraide au temps du corona*

Journaux et revues en accès libre

Le British Medical Journal donne accès gratuit à tous ses articles relatifs au COVID-19. L’importante revue médicale donne déjà accès libre en temps normal aux articles de résultats de recherche. S’ajoutent donc les articles plus conjoncturels sur l’actuelle pandémie. D’autres revues et journaux ont abaissé partiellement leurs “paywalls” afin de donner accès aux articles sur la crise sanitaire actuelle. Le Globe and Mail, la revue Science, les Carnets de science du CNRS français, le Centre d’information Covid-19 (le Novel Coronavirus Information Center) de Elsevier, le New York Times et sa section The Coronavirus Outbreak, d’accès libre (en donnant son adresse courriel), le Financial Times, The Atlantic, la revue Nature ? Quelques articles dont plusieurs sur le coronavirus semblent d’accès libre; la revue Esprit, annonçait — Covid-19 : nos articles en accès libre; le Centre Déclic : créé par 5 journaux québécois et la revue Québec Science “pour répondre à vos questions”, …

Santé publique ET climat

Les coûts et l’impact de COVID19 mettent en péril les actions climatiques nécessaires et urgentes. Les villes et villages peuvent faire une différence. Ils ont de l’imagination, des compétences, des solutions.

The cost and impact of coronavirus will imperil necessary action on the climate emergency. Towns and cities must use their collective imaginations to make a difference, The Guardian view on Europe’s green deal: stick to the plan


* vous me permettrez cette contraction en référence à L’amour au temps du choléra.

l’entraide au temps du covirus

Je me suis demandé si je ne devais pas me « la fermer », pour ne pas ajouter à la cacophonie et la surcharge d’information… Et puis je me suis rappelé ce que j’ai fait, depuis 25 ans sur Internet. Filtrer, commenter, redistribuer l’information que je trouvais pertinente sur le tout nouveau « WWW ».  Ce travail en est un de recherchiste, « fact checker » on dirait aujourd’hui. Mais c’est plus que fact checker, car ce n’est pas toujours en réaction à une parole publique ou influente. Il y a de la recherche, de l’exploration, de l’intuition dans cette activité de survol d’une quantité incommensurable d’information. 

Je pense que ce n’est pas le temps de me taire, même si je devrai faire preuve de discernement dans l’utilisation des différents canaux qui me sont accessibles. Ne pas inonder Facebook de ce qui sied plutôt au fil Twitter; utiliser mon blogue pour résumer, organiser les éléments déjà commentés sur T ou FB, ajouter sources et extraits plus substantiels. Chaque jour ? Chaque semaine ? On verra.

Les trois tests que les gouvernements ont à passer

Pour nous sortir le mieux possible de ce merdier, selon Michael Sabia, les gouvernements devront passer ces trois tests. Le premier : réussir à protéger les citoyens du virus. Le second test : assurer une descente contrôlée de l’économie vers le bas, vers la quasi inactivité. Le troisième test : profiter des efforts nécessaires pour relancer l’économie pour restructurer l’économie en fonction des besoins de demain.

Governments will need to lead on this. Leaving it to chance will only make the reignition process longer, more difficult and more haphazard. What’s more, we would forfeit a precious opportunity to shape our future economy. Remember Rahm Emanuel’s famous: “You never want a serious crisis to go to waste.”

That means governments need to begin thinking now about a new generation of infrastructure and spending on education. About clean tech and retooling our health-care system. And about refinancing for the long term a small and medium enterprise sector that will emerge from this crisis battered but still the engine of jobs in our economy.

Opinion: In this pandemic, governments will face three tests —including how best to restart the economy – The Globe and Mail

Je me demandais, dans un billet récent, qui avait dit ça. Sabia vient de répondre à ma question : Remember Rahm Emanuel’s famous: “You never want a serious crisis to go to waste.”

Même si nous n’en sommes pas encore aux mesures de relance (le 3e test) il semble bien que le gouvernement fédéral tentera en douce de soutenir l’avenir d’une industrie qui n’en a pas. « Ottawa prepares multibillion-dollar bailout of oil and gas sector« . Ne devrait-on pas plutôt inclure un tel financement public dans le programme général de reconstruction qui devra être élaboré ?

Ce que disait René Lachapelle sur Nous.blogue : « Est-ce que, cette fois, les fonds publics seront consacrés à rétablir la sacro-sainte croissance ou bien prendrons-nous un tournant vers le respect des ressources vitales? »

Difficile de parler d’autre chose…

Par définition une crise de santé publique, comme une période de guerre, chamboule toutes les habitudes, fait taire les vieilles chicanes et conflits politiques pour mobiliser et unir les efforts autour d’une direction concertée, centralisée. L’ennemi est clair, la stratégie fait consensus… ou presque. Nous avons la chance, au Québec, d’avoir un niveau élevé de confiance dans les institutions et les leaders en place. Nombre de fois j’ai entendu (ou lu) des non-caquistes souligner le « bon travail » accompli par le premier ministre Legault. Le dernier sondage Léger-Le Devoir donne 85% d’approbation pour le premier ministre québécois. Il y a clairement un abaissement du niveau critique devant un danger reconnu comme réel et autour de mesures reconnues comme nécessaires ou utiles. Il faut faire front commun, et si le niveau de critique s’abaisse à l’endroit de la direction collective, il s’élève et peut devenir agressif à l’égard des resquilleurs et des comportements égoïstes ou écervelés qui mettent en danger la collectivité.

« Il n’y a rien de pire que de gâcher une bonne crise. »

Qui a dit ça ? Peu importe, ce qu’il voulait dire c’est que les périodes de crise sont des moments propices aux changements, aux ruptures, aux innovations. Il faut saisir l’occasion de changer des processus ou des habitudes, des manières de faire (ou de compter?) que nous savions devoir changer. Le télé-travail, qu’on expérimente actuellement de manière plus poussée que jamais, peut être vu à plus long terme comme une contribution à l’atteinte des objectifs de carboneutralité. La relation par courriel entre médecin et patient, essentielle à une gestion du risque et des déplacements pourrait devenir la signature, le privilège de la relation avec son médecin de famille. La reconnaissance du travail accompli par les éducateurs, qu’on se trouve à remplacer temporairement, avec les moyens du bord… et dont on mesure tout à coup l’immense talent et l’incommensurable dévouement. 

Mais, diront certains, tout le monde est chamboulé, boulversé, déstabilisé… c’est peut-être pas le temps d’établir de nouveaux standards ! Oh que si !! Comme le rappelait ce matin Francine Pelletier dans Le Devoir, « On l’a vu après chaque grand conflit où des mesures d’exception sont ensuite devenues la règle. Pensons aux femmes dans les usines en 1939. »

Cependant, pour établir de nouvelles règles, il faut commencer par s’abstenir de tout investir nos ressources, notre marge de manoeuvre dans le sauvetage des anciennes règles. Il faut profiter du recul obligatoire qui nous est offert pour se demander, enfin : « Est-ce bien essentiel que je puisse faire le tour de la boule une fois par an pour aller me faire dorer la couenne quelques jours ? » Avant d’investir des milliards, comme s’apprête à le faire notre voisin du sud, le clown en chef, pour sauver les pauvres compagnies aériennes.

N’est-il pas temps de se demander pourquoi les pandémies se succèdent à un rythme de plus en plus soutenu ?

Contre les pandémies, l’écologie. Sonia Shah, Le monde diplomatique. Voir aussi : Coronakrach.

Les bourses ont déjà perdu 30%, et les faillites en cascade dues aux décisions récentes de fermetures et de réduction d’activité n’ont pas encore été prises en compte… Le fonctionnement « à flux tendu » de nos économies, sans stockage ni provisions, s’avère bien fragile lorsque les chaines internationales d’approvisionnement hoquettent.

For decades, individual firms’ relentless efforts to eliminate redundancy generated unprecedented wealth.

Will the Coronavirus End Globalization as We Know It?, Foreign Affairs

Parlant de flux tendu, si les gouvernements décident d’assouplir les dates de remise des impôts et prélèvements fiscaux, qu’en est-il des compagnies de crédit ? Les dûs sur les cartes de crédit seront-ils facturés à des taux de 20% comme d’hab ? Une cascade de faillites est aussi à prévoir de ce côté.

Pour terminer sur une note plus gaie, la réduction des pressions sur l’environnement est déjà visible : les canaux de Venise montrent une eau claire ; les dauphins reviennent au port, en Sardaigne;

La pollution dans ses différentes formes atteindra sans doute des minima dont nous devrions prendre note précieusement, consciemment. Ce sont des seuils de stress et de pression sur l’environnement que nous voudrons ramener à l’avenir, mais de manière ordonnée et planifiée. Comme l’expliquait bien Philippe Bihouix, le « décalage des points de référence » empêche les générations de prendre vraiment conscience de la détérioration drastique de notre monde.

« les scientifiques prennent comme point de référence l’état des stocks et la composition en espèces qu’ils connaissent au début de leur carrière ; quand une nouvelle génération démarre, les stocks ont décliné et le point de référence s’est donc décalé (107). Ce concept peut être appliqué à l’environnement (on parle alors d’amnésie environnementale : les enfants ne s’affolent pas du manque de papillons, ni les Grecs de l’absence de lions…). Mais surtout, généralisé à tous les domaines »

Jusqu’où le monde peut-il s’éroder ?, in Collapsus : Changer ou disparaître ? Le vrai bilan sur notre planète.

Comment profitez-vous de cette brisure dans les habitudes pour faire avancer certaines transformations souhaitables de nos habitudes et manières ? Une formation pour une utilisation plus poussée (et positive) des médias sociaux ? Le développement de services de livraison à domicile pour les ainés et personnes fragiles ?

H1N1 : le rôle de l’OMS

Ce court article dans le Globe and Mail d’aujourd’hui mérite d’être lu. Comment l’OMS a exagéré (overshot) à propos du H1N1. Exagération dans la définition de la pandémie; dans la couverture nécessaire; dans la poursuite du plan, sans égard aux données réelles qui contredisaient les prévisions.

Sans vouloir tout mettre sur le dos de l’OMS (et de la santé publique locale) il sera important de tirer les vrais leçons pour s’assurer  de conserver le maximum de gains de l’opération… qui a coûté assez cher, merci.

vaccination H1N1 : éléments de bilan

Intéressant que ce document français : la circulaire du Ministère de l’Intérieur du 21 août 2009 (pdf 19 pages), qui donnait le mandat aux Préfets de préparer et diriger la campagne. L’échec de cette campagne est vu par certains comme un (autre) échec de la gouvernance des préfets, dans une société de plus en plus composée d’agents libres plutôt que de petits soldats.

Au Québec, en date du 7 janvier, 57,1% de la population était vaccinée. Ce taux atteint 80% dans le nord (Baie James et Nunavik) et plus de 70% en Gasépsie, au Saguenay, sur la Côte-Nord. Montréal et l’Outaouais affichent les plus bas taux, avec 50 et 48% de couverture vaccinale. La Capitale nationale : 61%.

Au Canada ?… Très difficile de trouver des données… Beaucoup sur les cas d’hospitalisation… peu sur les taux de vaccination

En Atlantique, près des deux tiers de la population ont été vaccinés et au Québec, plus de la moitié de la population a reçu le vaccin.

Par contre, en Ontario et dans l’Ouest canadien, moins du tiers de la population est immunisée. (Radio-Canada, 24 décembre)

À l’échelle internationale…

Suède serait la grande championne de la vaccination avec 61 % de sa population qui avait été vaccinée la veille de Noël

l’Allemagne n’a vacciné que 5 % de sa population, la France à peine 8 % et le Royaume-Uni, seulement 6 % (Le Soleil, 24 déc.)

Pourquoi tant de Canadiens, comparativement aux Français ? Ici un commentaire, sur ce blogue français consacré à la pandémie.

[Note 2022 : le bilan français est toujours en ligne sur http://blog.slate.fr/h1n1/ ]

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