J’ai été organisateur communautaire (OC) dans le réseau des CLSC de 1976 à 2012. Frais émoulu du module Animation et recherche culturelles de l’UQAM, j’ai trouvé un emploi d’OC dans le secteur public sans passer par le travail dans le monde associatif comme c’est le plus souvent le cas aujourd’hui.
Embauché en 1976 comme organisateur au PPA, programme personnes âgées comme on l’appelait, j’étais aussi, à la même époque, militant d’une organisation marxiste-léniniste (En Lutte !) jusqu’à sa dissolution en 1981 (82?).
En 2016 et 2018 j’ai accepté de rencontrer une doctorante québécoise (Annabelle Berthiaume) et une prof à l’Université de Paris 8 (Audrey Mariette) qui étaient intéressées à mieux connaître la pratique d’organisation communautaire dans le réseau public du Québec. Deux entretiens réalisés dans le cadre de deux recherches distinctes qui ont servi de base à cet article décrivant le parcours professionnel de « Michel » au « CLSC Maçon ».
Dans le processus conduisant à la publication j’ai rencontré les auteures à deux reprises, ce qui a permis de préciser certains termes. Mais c’était LEUR publication, même si c’était mon parcours ! Le résultat représente un travail attentif de synthèse qui porte un regard sur l’évolution d’une pratique professionnelle « marginale », mal connue, qui a longtemps été mal perçue par les autorités. Qui était parfois mal vue par les militants des organisations communautaires des quartiers où se développaient les premiers CLSC.
Résumé : Cet article porte sur l’émergence, la structuration et les pratiques d’un groupe professionnel, celui des organisateur·rices communautaires (OC) au sein du réseau public de la santé et des services sociaux au Québec. S’appuyant sur des pratiques issues des mouvements sociaux, le segment étatisé de ce groupe professionnel s’est adapté tout en participant aux évolutions de l’action publique pour définir sa position et maintenir le sens de son travail au service des habitant·es des quartiers populaires et de la lutte contre les inégalités sociales. À partir du cas d’un OC ayant exercé dans un quartier populaire de Montréal de 1976 à 2012, nous revenons sur les incertitudes et les ambivalences qui ont accompagné la professionnalisation du groupe des OC au sein du service public, entre approche contestataire et approche pragmatique de l’action publique. L’étude de cette trajectoire singulière insérée dans la trajectoire collective du groupe professionnel éclaire les transformations de l’État social pour montrer comment les tensions constitutives du métier et les pratiques professionnelles entre action collective et action publique se reconfigurent.