ces revues qui nous éclairent

En terminant le dernier billet je me disais que je devrais faire un tour d’horizon des principales revues et publications périodiques qui viennent nourrir ma réflexion et alimenter ma perception du monde.

Il y a ces revues « traditionnelles », dont certaines sont plus que centenaires, qui sont des références dans leur domaine. À ce chapitre, je ne suis actuellement abonné qu’à trois: Science, Esprit et Foreign Affairs. J’ai déjà été abonné pendant des périodes plus ou moins longues à Atlantic, Harpers, Le Monde diplomatique, The Economist ou, plus localement, L’Actualité…

Et puis il y a les revues plus sociales ou militantes, qui sont engagées dans le combat pour changer ce monde insoutenable. Depuis quelques mois, sans m’abonner encore, j’ai acheté chaque numéro de la parution mensuelle Socialter, qui abordait des thèmes intéressants : On se soulève et on casse , dont j’ai parlé ici; La tragédie de la propriété ; Reprendre les choses en main – Le bricolage contre le productivisme ; et le dernier en date L’écologie, un truc de bourgeois ? . À chaque mois, une centaine de pages d’articles, d’entrevues dans une mise en page dynamique qui me rappelle parfois les élans de créativité de la défunte revue québécoise Mainmise (ou, de la même époque : Le temps fou ou La vie en rose

Côté québécois j’ai été amené à la revue À bâbord par les articles de Philippe de Grosbois sur le numérique (L’après-Facebook des médias d’info parue dans À bâbord! #97). Je sais bien qu’il y a plus d’une revue « de gauche » au Québec… Au moins deux me viennent en tête : Possibles (qui, incidemment, publie ses articles in extenso, accessibles gratuitement sans délais) et Relations (à laquelle j’ai été abonné longtemps).

Une initiative relatée par À bâbord au printemps 2023 : Rendez-vous des médias critiques de gauche, a conduit au lancement du site Gauche.Media par le Regroupement des médias critiques de gauche en octobre dernier. Ce Regroupement incluait, suivant l’énumération sous l’onglet « Membres » du site web :

On peut s’abonner au fil RSS de Gauche.media et recevoir dans son agrégateur (Feedly, Netnewswire…) les titres, auteurs et liens à mesure qu’ils sont publiés. Incidemment, c’est malheureux que les Carnets publics de l’environnement Praxis ne permettent pas ce type d’abonnement. À défaut de pouvoir s’abonner aux fils RSS des Carnets on peut s’abonner à son infolettre L’édito quinzo.

Mais les « revues » sont aujourd’hui concurrencées par des sites web qui peuvent publier des contenus, des articles, des rapports de recherche ou des informations d’actualité sous forme de « newsletter » ou infolettre (lettre hebdomadaire, mensuelle envoyée aux inscrits ou abonnés) : tels les sites de l’IRIS (Institut de recherche et d’informations socioéconomiques), du TIESS (Territoires innovants en économie sociale et solidaire), Vivre en ville (ce dernier n’ayant pas de fil RSS (!) il faut s’abonner à l’infolettre). Le site Vert publie deux infolettres : hebdomadaire et quotidienne.

Sans compter les nombreuses, innombrables revues professionnelles. En travail social (Intervention : Publiée deux fois par année par l’Ordre des travailleurs sociaux et des thérapeutes conjugaux et familiaux du Québec; Nouvelles pratiques sociales; la revue canadienne sur les OSBL et l’économie sociale [articles en anglais, même si le titre est bilingue!); en administration publique (j’aime bien le bulletin de veille Observgo), en développement régional (Développement durable & territoires)…

Des découvertes récentes :

  • LVSL (Le Vent Se Lève) part d’un constat : celui d’une défaite historique des forces de progrès. « Notre projet s’annonce donc comme une entreprise de reconquête ». Un paragraphe dans la description du projet me rappelle ou me fait découvrir d’autres publications « de gauche ».
  • Et aussi : Blast, source de vidéos, articles, reportages… : « Dans un monde où le désastre écologique nous guette, dans un pays où la majorité des médias défendent les intérêts d’une minorité, où la surenchère autoritaire du pouvoir semble ne plus avoir de limites, il est nécessaire de compter sur des médias indépendants, accessibles au plus grand nombre pour aiguiser l’esprit critique et donner envie de résister et d’agir. »

Incidemment c’est le fil de Presse-toi-à-gauche qui me fait connaître le dernier bouquin de Éric Pineault : The social ecology of capitalJ’ai demandé à l’auteur si une version française était prévue : il semble que non. Mais il m’a dit qu’il préparait un livre en français sur un sujet similaire… Finalement le livre en anglais est, somme toute, assez facile à lire. Le thème de ce livre venait compléter, développer la perspective que je venais de lire dans Slow down : the degrowth manifesto par Kōhei Saitō. Deux livres sur lesquels je reviendrai dans un prochain billet.

ESS, régulation, écologie solidaire

Un résumé critique du livre de Robert Boyer (L’Économie sociale et solidaire Une utopie réaliste pour le XXIe siècle) par Benoît Lévesque dans la Revue de la régulation : L’avenir de l’économie sociale et solidaire : l’éclairage de la théorie de la régulation. À propos du livre de Robert Boyer. Pour ceux et celles qui s’intéressent à l’économie sociale et solidaire, Benoît Lévesque donne le goût de lire le petit livre de Boyer, tout en soulevant quelques bonnes questions.

J’ai bien l’intention de lire le livre de Robert Boyer mais une petite phrase à la fin de l’article de Lévesque a attiré mon attention : « Bernard Billaudot (2022), dans un riche ouvrage, montre que toutes les sociétés sont fondées à la fois sur une vision du monde (une cosmologie) et sur des modalités de justification de leurs activités et de leurs relations. »

Dans un riche ouvrage, ça m’a intrigué. J’ai trouvé cet ouvrage : Société, économie et civilisation. Vers une seconde modernité écologique et solidaire, qui, malgré son fort volume (quelques 3000 pages !) est disponible gratuitement en format epub, pdf ou en ligne.

Si vous n’aviez pas encore de lecture pour la fin de l’été…

De la charité à la solidarité: bilan de la deuxième Promenade de Jane

Le 6 mai dernier, près d’une trentaine de personnes ont participé à la Promenade de Jane organisée par Gilles, Tareq et moi-même. Intitulée « De la charité à la solidarité: initiatives communautaires dans Hochelaga-Maisonneuve », cette activité avait pour objectif de déceler certaines traces d’une époque où les services sociaux étaient intimement liés à la paroisse catholique. En traversant le quartier d’Ouest en Est sur la rue Adam, puis en remontant jusqu’au Marché Maisonneuve par la rue Viau (cliquer sur le lien pour voir notre itinéraire), nous avons croisé plusieurs églises, presbytères et Caisses populaires aujourd’hui convertis en organismes communautaires. En quelques coins de rues, nous avons pu voir combien l’action communautaire est imbriquée dans une histoire qui noue ensemble les acteurs publics, privés, communautaires et religieux.

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Église Saint-Clément, vers 1910. Crédit: Musée McCord, Héritage Montréal

Dans le Québec de la fin du 19ème siècle, c’est l’Église et la famille qui assurent principalement l’éducation, les soins et la sécurité sociale. C’est d’ailleurs une quinzaine d’églises (principalement catholiques) qui se retrouvent aujourd’hui sur le territoire d’Hochelaga-Maisonneuve, dont plusieurs sont bâties à cette époque. Notamment, l’Église Saint-Clément de Viauville, achevée en 1902, fait partie de l’ensemble religieux le plus vieux encore existant dans Maisonneuve aujourd’hui.

Mais certains riches industriels dans ce « Pittsburg du Canada » marquent également le début du 19ème siècle, comme c’est le cas de Charles-Théodore Viau, célèbre pour la biscuiterie du même nom, qui donne l’impulsion pour fonder une nouvelle paroisse dans le secteur de Viauville. Il défrayera d’ailleurs les coûts de construction de l’Église Saint-Clément, en plus des frais de culte durant la première année.

Article publicitaire intitulé Maisonneuve  » La Pittsburgh du Canada « . La ville la plus progressive du Dominion du Canada. Sans date. Crédit: Archives de l’Atelier d’histoire d’Hochelaga-Maisonneuve, Musée du Château Dufresne

Quelques années plus tard, durant les 35 années qu’a existé la Ville de Maisonneuve (avant son annexion à Montréal), plusieurs hommes politiques et industriels locaux sont inspirés par le City Beautiful, un mouvement urbanistique qui vise à faire de la ville un espace vert et attrayant afin de faciliter la cohabitation des familles ouvrières et bourgeoises. C’est la période de construction de plusieurs beaux édifices que l’on retrouve encore aujourd’hui autour de l’avenue Morgan.

Aujourd’hui, que reste-t-il de cette présence des congrégations religieuses dans le quartier ? Durant notre marche, nous avons remarqué que plusieurs églises ont offert leurs installations aux organismes communautaires du quartier. 

L’Église Saint-Mathias devenue le Chic Resto Pop. Crédit: Alexandre Claude

Quelques membres des congrégations religieuses ont d’ailleurs participé à la mise sur pied d’organismes qui ont pignon sur la rue Adam, comme la Soeur Annette Benoit au Chic Resto Pop ou le Frère Claude Hardi à la Maison Oxygène. Également, certains organismes communautaires reçoivent toujours du financement des congrégations – un des moins contraignants si on se fie aux représentant.es des organismes que j’ai interrogé dans le cadre d’une recherche il y a deux ans. Le patrimoine religieux ne se retrouve donc pas uniquement dans le cadre bâti, comme le disait Gilles à la fin de sa Promenade de Jane l’an dernier.

Au cours de notre circuit, nous avons aussi parlé de nouvelles initiatives qui ont émergées plus récemment dans le quartier. Parmi celles-ci, soulignons SOS itinérance qui fait la distribution de repas et de vêtements aux gens dans le besoin et qui sert de halte-chaleur durant la nuit par temps de grand froid et le Troc N Roll, un événement de troc de jouets et de vêtements pour enfants et femmes enceintes, organisé par le comité de parents de 200 portes, un projet de la table de quartier Hochelaga-Maisonneuve.

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Le Troc N Roll au Chic Resto Pop. Crédit: Mélanie Dusseault, QuartierHochelaga

Portées par des bénévoles, notamment beaucoup de femmes du quartier, ces activités pourraient être associées à une « charité » traditionnelle, c’est-à-dire à un simple acte de générosité, où les sans-abris, les personnes qui cherchent à manger ou encore les parents peuvent venir chercher des biens presque gratuitement. Pourtant, ces évènements manifestent aussi une grande solidarité, lorsqu’on s’y intéresse un peu et que l’on voit les liens tissés entre les dizaines bénévoles qui vont faire du dumpster diving (récupération des déchets alimentaires) ou qui viennent à l’avance plier les vêtements et préparer les tables avant le troc.

Bref, les manuels scolaires et les cours sur l’histoire des services sociaux québécois, comme dans bien d’autres enseignements, ont tendance à nous présenter l’histoire en période, tranchées et définies, chacunes d’elles se refermant avant la suivante. Pourtant, rien, par le passé, n’a été « tout charité » – comme rien n’est « tout solidaire » aujourd’hui. C’est la raison pour laquelle il reste tant de choses à écrire !

P.S. Vous avez été quelques-un.es à me poser des questions sur mes travaux de recherche. Je vous invite à m’écrire ou consulter mon profil si cela vous intéresse. Au plaisir 🙂 ! 

Annabelle

bénévolat des jeunes

[L]a génération qui compte le plus grand nombre de bénévoles, c’est celle des jeunes (14-18 ans)(…) [Redécouvrir] les motivations et bénéfices du bénévolat : l’implication citoyenne, bien sûr, mais aussi la découverte de soi, la bonification du curriculum vitae, la création d’un nouveau réseau, et qui sait, peut-être même une orientation professionnelle. (…) le meilleur outil pour faciliter le bénévolat jeunesse était un portail Internet.

Un article tiré de MédiaK, le site de la revue K (anciennement Développement social).

le Web de demain…

Facebook, YouTube et tant d’autres sont, chacun à leur manière des projets de nature carcérale, c’est-à-dire qui valorisent et exploitent la complétude de l’entre-soi. […] A ce Web carcéral fait écho le discours politique d’une criminalisation des pratiques, alibi commode pour porter atteinte à la neutralité du Net au seul profit d’intérêts marchands et sans égards pour ce qui fut un jour une terra incognita pleine de promesses. [Olivier Ertzscheid, aujourd’hui dans le quotidien Le Monde]

Un petit texte « punché » de Olivier E. (je n’arrive pas à prononcer son nom !)… qui souligne le danger qui guette le Web tel que nous l’avons connu depuis une vingtaine d’années. Et qui peut prédire le modèle qui l’emportera : celui qui flatte les tendances naturelles du confort du connu et de l’approbation par ceux qui pensent comme moi… ou un modèle plus ouvert à la confrontation, à l’imprévu et l’inconnu – générateur, parfois, d’inconfort et de « saletés » mais aussi de trouvailles, d’innovations et de sérendipité.

de mères et d’autres

Je viens de terminer la lecture d’un livre passionnant… et je me demandais ce qui pouvait bien intéresser d’autres lecteurs, peut-être un peu moins éclectiques que moi, dans ce pavé de 300 pages bien tassées. Un livre que le professeur J. Fraser Mustard citait avec enthousiasme lors de sa présentation aux JASP (voir le dernier vidéo) de mars dernier [sa présentation en PPT].

Pourquoi l’étude des formes ancestrales de la maternité, ou plus généralement des formes collectives de l’éducation et des soins apportés aux enfants qu’on peut déduire de l’analyse de la culture des sociétés traditionnelles de cueilleurs et chasseurs, mais aussi de l’éthologie des primates et d’autres espèces animales… pourquoi cela aurait-il quelqu’importance pour l’orientation de la société d’aujourd’hui ?

Les solides arguments avancés par Sarah Hrdy ramènent à leur juste dimension les prétentions de certains politiciens, anthropologues ou autres savants prompts à définir la « nature humaine » et en particulier la place et le rôle des femmes dans les sociétés humaines. Le sous-titre du volume : l’origine évolutionniste de la compréhension mutuelle (the evolutionary origins of mutual understanding) donne une idée de la largeur de vue déployée par l’auteure. Continuer la lecture de « de mères et d’autres »

la place des hommes

Many men no longer want to be identified just by their jobs,” dit un jeune Suédois, suivant cet article (The Female Factor) du New-York Times. C’est une bonne chose car ils occupent de moins en moins de place sur le marché du travail…

Et c’est une tendance qui ne semble pas devoir décélérer : « Earlier this year, women became the majority of the workforce for the first time in U.S. history. Most managers are now women too. And for every two men who get a college degree this year, three women will do the same.» [The End of Men, dans le numéro juillet/août de The Atlantic]

photos, films, animations

Un nouveau reportage photo, dans le cadre du projet PIB : Bien pratique, la crise décrivant les conditions de travail, de mise à pied d’une travailleuse du secteur de l’hôtellerie de Toronto.

Mais j’apprends aussi l’existence de ce documentaire Web (avec ce que cela veut dire d’interactivité) à la faveur de ses nombreuses nominations au 14e « Webby awards » : Waterlife. Un documentaire sur l’eau, les Grands Lacs.

Ces nominations me semblent méritées !

Autres articles similaires :

état du monde en 2010

Le bilan annuel « State of the World » pour 2010 : Transforming Cultures. Publié chaque année par le réputé Worldwatch Institute il se présente cette année avec, enfin, une bonne différence entre le prix de la version PDF ou Kindle (9,95$) et celle de la version papier (19,95$). Ce qui n’a pas toujours été le cas. Bravo ! Et mieux que ça, les différents chapitres sont disponibles en version PDF, gratuitement. N’y manquent que les notes (qui elles sont inclues dans le PDF acheté).

Les différents chapitres disponibles :

Je crois que je vais acheter la version papier, pour dire mon approbation ! Non, quand même, soyons conséquent : la version PDF.